Visible un peu partout dans Paris, l’affiche de « Femmes photographes de guerre », l’exposition actuellement présentée au Musée de la Libération, s’appuie sur un cliché réalisé en 1975 par Christine Spengler lors du bombardement de Phnom Penh. Un demi-siècle après les événements, la photojournaliste est revenue sur les circonstances de ce reportage et, plus généralement, sur l’influence qu’a eue Francisco de Goya sur son travail : « Cette photo à Phnom Penh, je l’ai prise en grand-angle. Goya, quand il peignait, il montrait tout ce qu’il se passait autour. Il y a toujours de l’espace en haut pour contextualiser. Chaque fois que je photographie, je pense à lui et je prends du recul. »
C’est en perdant la vie pour la 22e fois dans un jeu vidéo que Rafael Heygster s’est demandé dans quelle mesure cette expérience virtuelle avait à voir avec la réalité de la guerre. Ainsi a-t-il commencé un projet documentaire autour des parades militaires, des salons de vente d’armes, du paintball, etc., autant d’activités périphériques à la guerre qui, drapées dans leur banalité, tendent à rendre la mort abstraite… jusqu’à ce qu’elle frappe « pour de vrai ».
Le travail de Rafael Heygster est à voir en ce moment au Centquatre-Paris, tout comme l’étonnant « Shifters », projet de la plasticienne polonaise Marta Bogdańska qui explore l’histoire militaire du point de vue animal (où l’on apprend que le premier chat espion a été écrasé par un taxi new-yorkais).
Chapeaux en suspension, mosaïques colorées au milieu du désert, ribambelles de ballons sortis de nulle part… Quand on voit les photos-performances de Scarlett Hooft Graafland, on se demande toujours dans quelle mesure elles font appel aux outils de retouche numériques. Cette vidéo donne un embryon de réponse.
LE SAVIEZ-VOUS ?
« Je n’ai pas voulu aller en Ukraine, ni faire partie de la masse de journalistes qui y sont présents. Je crois qu’il faut savoir accepter de ne plus avoir sa place dans certains endroits, et je n’ai plus envie de m’abîmer pour quelque chose qui me dépasse. A vrai dire, je ne suis plus attiré par cette grammaire photographique sensationnaliste du conflit, et j’ai l’impression qu’on consomme le conflit, plus qu’on ne le pense. Moi, je cherche plutôt à interpeller le public et à l’emmener dans une réflexion. » Stephen Dock. À écouter en longueur ici, interviewé par des élèves du lycée Jacques Decour.
EN (très) BREF : QUELQUES BOURSES & APPELS
• Bourse Laurent Troude (29 avril)
• Prix Virginia (7 mai)
Dans son tout dernier album, Study of the Invisible, la pianiste Vanessa Wagner interprète une pièce composée en 2012 par Caroline Shaw et ayant pour titre « Gustave Le Gray ». Que vient faire ici le pionnier de la photographie, notamment connu pour ses marines ? La compositrice américaine s’en est expliquée dans une interview donnée en 2015 à New Music Box : « Il était célèbre pour avoir développé une technique permettant de représenter les nuages sur une photographie. C’est une idée assez simple. Mais il y avait quelque chose dans l’idée de créer une image fixe et de la regarder se développer lentement qui semblait approprié pour un titre. » Le fait que Gustave Le Gray soit contemporain de Chopin, dont la Mazurka op. 14 en la mineur a inspiré Caroline Shaw, a aussi influencé ce choix. Mais trêve de blabla, écoutez plutôt…
« Clique Clac », c’est chaque jeudi le résumé d’une semaine sur la Toile en dix entrées et quelques liens sélectionnés par la rédaction de Chasseur d’Images.