Henriette Sabroe Ebbesen n’a pas besoin de Photoshop et encore moins de Midjourney pour insuffler une part d’irréel à ses images. Donnez à la Danoise un miroir et elle transforme un portrait en puzzle émotionnel, un nu en paysage dérangeant. Médecin de formation, elle envisage chaque prise de vue comme une petite expérimentation scientifique. « C’est comme créer une illusion avec les miroirs, a-t-elle confié à Metal Magazine, mais plus encore, je veux que le spectateur s’interroge sur ce qu’il voit. En pratique, je déforme la réalité et la capture avec mon appareil photo pour que le spectateur fasse l’expérience d’une réalité différente de celle à laquelle il est habitué. » Pour tordues qu’elles soient, les images d’Henriette Sabroe Ebbesenont quand même tapé dans l’œil des iconos de Vogue ou Vanity Fair.
NOUVELLES ÉCRITURES
Si vous êtes à Paris ce week-end et que vous aimez la photographie documentaire, rendez-vous aux Halles des Blancs-Manteaux (4e). Le lieu accueille Photo Doc, un salon présentant une vingtaine de galeries, collectifs, maisons d’édition et festivals ayant pour point commun un certain goût (et même un goût certain) pour les travaux au long cours. Des regards différents sur le monde où la subjectivité a toute sa place. Dana Cojbuc, dont le travail est présenté par la galerie Echo119, résume bien l’esprit de l’événement : « Une image ou un paysage ne deviendront nôtres que lorsque l’on y aura placé une parcelle de soi, intime et secrète – fragments de rêve ou vague d’imaginaire – qu’un souvenir viendra s’y accoler ou que nos désirs viendront l’investir. » Parallèlement aux expositions, le salon Photo Doc propose pendant trois jours un stimulant programme de tables-rondes auxquelles prendra part, entre autres, Julien Magre, lauréat du Prix Niépce 2022.
NOS RÉGIONS ONT DU TALENT
• Pour promouvoir sa production, la société lorraine L’Europe vue du ciel offre chaque mois une photo « fond d’écran ».
• Loin des clichés paradisiaques, Pauline Vanden Neste est allée à la rencontre des jeunes de Saint-Denis de La Réunion.
Diplômée de l’École nationale supérieure de la photographie en 1997, Géraldine Lay occupe depuis 2019 le poste d’éditrice pour la Photographie et l’Art contemporain chez Actes Sud. C’est à elle, par exemple, que l’on doit la refonte de la collectionPhoto Poche. Parallèlement, elle poursuit un travail personnel entre photo de rue, portrait et documentaire qui l’a conduite en Écosse ou au Japon. Invitée du podcast Vision(s), l’Arlésienne a expliqué comment les aléas de son parcours et des rencontres l’ont amenée à porter cette double casquette.
Géraldine Lay est représentée par la galerie lyonnaise Le Réverbère – tout comme Yves Rozet, photographe discret dont on a appris la disparition cette semaine.
50 ANS SUR LA BRÈCHE
Toujours en activité à l’âge de 75 ans, l’inaltérable James Nachtwey côtoie la mort depuis la début de sa carrière, celle des civils qu’il a photographiés sur les théâtres de guerre (de l’Irlande du Nord à l’Ukraine), celle de ses collègues (Ken Oosterbroek, tué par balle en Afrique du Sud au début des années 1990) ou encore celle des innocents qui se trouvaient dans les Twin Towers en septembre 2001. Interrogé par 60 Minutessur le sentiment qui prédomine lorsqu’il regarde ses images, Nachtwey répond simplement : « la colère ».
QUAND JEU VIDÉO RIME AVEC CYANO
Comme beaucoup d’autres jeux vidéo actuels, Ghost of Tsushima dispose d’un mode photo. Tombé sous le charme du jeu durant le confinement, Sam Bulleit a mis ce mode à profit mais il a poussé l’expérience un peu plus loin en produisant des cyanotypes à partir de ses images. Le résultat a de quoi déstabiliser. D’ailleurs, certains lui ont même demandé comment il avait fait pour voyager en Asiedurant la quarantaine !
DISPARITION
Des courts de tennis aux circuits de Formule 1, des pistes d’athlétisme à celles du biathlon, Jean-Marc Pochat était ce qu’on appelle un photographe multisports. Figure du journal L’Équipe, il avait notamment réalisé la photo de Yannick Noah levant les bras au ciel juste après sa victoire à Roland-Garros : « J’avais pris l’option d’être dans la fosse, un pari risqué parce qu’il peut toujours y avoir quelque chose dans le cadre qui peut gêner. J’étais en fait sous la loge de son père. Je m’étais dit : Si Yannick est dos à moi au moment de la victoire, je l’aurai parce qu’il se retournera obligatoirement vers son père. Ce qui s’est passé. »Jean-Marc Pochat s’est éteint samedi dernier à l’âge de 71 ans.
EN BREF…
• Parce qu’il trouvait les traditionnelles photos de famille corsetées et finalement irréalistes, Colin Gray a pris la voie de la mise en scène, bien aidé par Ron et René, ses parents.
• Au Burundi,l’union fait la force… mais il reste du chemin à parcourir pour les femmes photographes.
• Et vous, quelle musique entendez-vous sur « Un bal en plein air » ?
• Une grenouille de verre et le microbiome d’une racine de maïs figurent au palmarès du concours de photographie scientifique organisé par la Fonds national suisse.
• Lors du lancement du 20 avril, la fusée Starship de SpaceX n’est pas la seuleà avoir morflé.
• Parce que la situation des insectes est critique, Rémy Artiges a choisi de les photographier morts.
• Si Leonard de Vinci vivait à notre époque, ses écorchés ressembleraient à ça.
• Plus dure sera la chute.
MUSIQUE
Pas forcément à l’aise devant l’objectif (le micro-costume de Barbarella n’aide pas), Olivia Ruiz a peut-être aussi été impressionnée par l’appareil moyen-format utilisé par Sacha Goldberger pour ses « Portraits croisés ». C’est sûr, on est loin du Lomo…
« Clique Clac », c’est chaque jeudi le résumé d’une semaine sur la Toile en dix entrées et quelques liens sélectionnés par la rédaction de Chasseur d’Images.