Cambodge - Laos - Myanmar (Fils Ouvert)

Démarré par Sebas_, Juin 18, 2017, 16:24:36

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Sebas_

Citation de: Rori le Juin 24, 2017, 18:49:14
J'ai tellement aimé ces pays que je me sens obligé de participer ...
Tu as bien fait, tes photos sont superbes.
Belle galerie FlickR aussi!

Rori

Citation de: Sebas_ le Juin 24, 2017, 19:43:40
Tu as bien fait, tes photos sont superbes.
Belle galerie FlickR aussi!
Merci,
j'ai beaucoup aimé tes photos sur la Corée du Nord et ton flick recèle plein de belles choses que je vais explorer ...
Tu vas ramener plein de merveilles du Myanmar.

Screeny

La séquence des 19 photographies qui vont suivre se rapporte à une visite qui m'a profondément marqué : celle de l'ancien lycée Tuol Sleng à Phnom-Penh (camp dénommé « S 21 » en langage codé par les Khmers rouges) aménagé cyniquement en centre de détention, de tortures et d'exécution durant la période 1975 -1979 par des « révolutionnaires » animés d'une haine viscérale pour l'élite du pays (fonctionnaires, étudiants, intellectuels...) sous la direction de  « Douch » ( ancien professeur de mathématiques qui a  d'ailleurs d'être jugé pour crimes génocidaires). À noter que de nombreux khmers rouges considérés comme déviants ou devenus traîtres à la cause y furent aussi « interrogés », torturés et exécutés par « Douch ».

Les autorités cambodgiennes ont aujourd'hui transformé Tuol Sleng en lieu de mémoire pour que les jeunes générations n'oublient pas. Mais aussi en lieu de « réconciliation » comme nous le verrons dans les dernières photos.

1/19- L'apparence d'un lycée ordinaire avec ses salles de classes et sa cour. 4 bâtiments disposés en U et construits pendant la période française. Durant la période khmère, dans une ville vidée de la plupart de ses habitants, le lieu était entouré de barbelés, complètement inaccessible parce que tout devait être fait dans le secret. Mais on sentait bien qu'il s'y passait des choses terribles et on l'évitait en rasant les murs...

Screeny

2/19- À leur entrée en détention, les détenus étaient soigneusement fichés, étiquetés et photographiés de manière anthropomorphique.

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3/19- Une détenue et son bébé

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4/19- Matricule 162

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5/19- Conditions d'incarcération inhumaines dans le bâtiment C : des réduits extrêmement étroits (2 m x 1 m )

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6/19- Autres types de réduits cellulaires dans le même bâtiment C

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7/19- Un détenu enchaîné en cellule (reproduction) : un jerrycan pour uriner, une boîte de munitions pour déféquer. Mais les gardiens se faisaient parfois un malin plaisir de ferrer leurs victimes hors de portée de ces ustensiles pour que celles-ci vivent dans leurs déchets. Puis, une fois ou deux par semaine, ils  passaient devant les cellules en insultant les détenus et en les arrosant à la volée d'un grand jet d'eau.

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8/19- Les salles de classe du bâtiment A avaient été aménagées en salles « d'interrogatoires » par les tortionnaires : les détenus étaient attachés sur ces sommiers et soumis à  « la question » durant des heures et des heures en étant torturés (coups, bastonnades, électrocutions etc...)

Les plus jeunes tortionnaires (12, 13 ans !) étaient réputés être les plus féroces.

L'important pour les Khmers rouges était de remplir des dizaines de pages d'aveux scrupuleusement répertoriés même si les plus avisés d'entre eux savaient que ces aveux arrachés sous la torture n'avaient pas grande valeur.

Sur le mur à gauche, la photo d'un cadavre calciné trouvé  dans cette pièce par des soldats vietnamiens qui délivrèrent  le camp en 1979.

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9/19- Dans la cour du lycée, quelques tombes : celles de 14 cadavres suppliciés trouvés par les forces vietnamiennes le jour de la libération du camp. Mais aussi ce portique qui, à l'origine, était un portique de gymnastique pour les élèves.

Screeny

10/19- Voici en quoi les khmers rouges l'ont transformé.

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11/19- Peinture illustrant une séance de torture s'inspirant du même principe.

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12/19- Autre exemple de séance d'interrogatoire sous torture.

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13/19- Le règlement intérieur (notez le cynisme de l'article 6 : surtout ne pas faire de bruit!)

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14/19- Sans commentaires...

Ces photos étaient faites par les tortionnaires eux-mêmes.

On évalue entre 16 000 et 20 000 le nombre de détenus qui ont succombé à Tuol Sleng parmi lesquels environ 2000 enfants.

Screeny

15/19- J'ai été frappé par cette inscription tracée sur un mur  par un visiteur.

Et, dans mon journal de bord, dans la colère, j'ai écrit à cet instant : «  Sidération absolue. Mais comment cela a-t-il pu se passer, fils de p....  ! Comment ? Nom de Dieu ? On voudrait que Tuol Sleng puisse servir à cette pédagogie de l'horreur. On le voudrait, mais au fond l'Homme n'apprend jamais rien de la révélation du pire de l'Homme. Sinon l'Histoire ne se répèterait pas. »

Une remarque au passage : les choses sont plus complexes.

À Tuol Sleng ne sont pas passés que des « innocents », à savoir de simples opposants au régime ou des « tièdes » à la révolution considérés comme des traîtres potentiels mais aussi quelques hauts cadres du régime précédent corrompu du général Lon Nol : et ces hauts responsables avaient leur part de sang sur les mains au moment où les Khmers rouges étaient eux-mêmes durement combattus et n'avaient pas encore pris le pouvoir.
De plus, quelques Khmers rouges qui n'étaient plus en faveur du régime de Pol Pot à un moment « T » ont pu aussi passer par Tuol Sleng.
Tout cela ne devant en rien excuser les crimes commis dans ce lieu, bien évidemment...

Screeny

16/19- À mon avis, discutable mais...bon : dans un esprit de réconciliation nationale, les autorités cambodgiennes ont décidé de nous montrer dans le bâtiment D ce que sont  devenus certains des anciens tortionnaires : à gauche, la photo d'un jeune khmer rouge dans les années 70, à droite le même devenu paisible pêcheur ou aimable guide touristique ou modeste artisan dans les années 2000. Le tout accompagnés d'un bref témoignage du photographié.

La plupart disent avoir été embrigadés de force à la suite de lavages de cerveaux et regrettent le mal qu'ils ont pu causer à leurs semblables car le propre du drame cambodgien de ces années noires est qu'il s'agit bien d'une forme d'auto-génocide !

Screeny

17/19- Par contre, celui-ci (sauf erreur de traduction de ma part) ne semble pas regretter ce qu'il a fait durant cette période, et même « pas du tout », même s'il estime normal d'être jugé !

Screeny

18/19- Deux hauts responsables de cette horrible période

Screeny

19/19- Deux autres responsables...

Conseils de lectures pour ceux que ça intéresse :

1) « Le portail » de François Bizot, un anthropologue  grand connaisseur du Cambodge, parlant couramment la langue qui raconte la période où il a été détenu par Douch en personne dès l'année 1971 (et donc bien avant la période khmère rouge 75-79) et les rapports personnels complexes qu'il a entretenus avec son bourreau avant que celui-ci ne devienne le responsable de Tuol Sleng)
 2)  « L'utopie meurtrière » de Pin Yathay, un rescapé du génocide ingénieur déporté avec toute sa famille pour des travaux forcés dans la jungle.

Sebas_

Citation de: Screeny le Juin 28, 2017, 15:40:01
La séquence des 19 photographies qui vont suivre se rapporte à une visite qui m'a profondément marqué : celle de l'ancien lycée Tuol Sleng à Phnom-Penh (camp dénommé « S 21 » en langage codé par les Khmers rouges) aménagé cyniquement en centre de détention, de tortures et d'exécution durant la période 1975 -1979 par des « révolutionnaires » animés d'une haine viscérale pour l'élite du pays (fonctionnaires, étudiants, intellectuels...)
Ce lieu est evidement dans ma liste de to do, merci du partage de ces photos!

Pour info, j'ai perdu mon arriere grand-pere dans le meme genre de conditions, lors de l'occupation de l'Indochine par les japonais. Mange par des rats pour la version officielle... Ma grand mere a passe 2 ans dans un couvent proche de Dalat (couvent des Oiseaux), bloquee dans la jungle avant de prendre le bateau pour rentrer en France.
Grand moment lorsque nous sommes retournes avec elle dans ce qui est maintenant "le musee des atrocites americaines" a Saigon dans les annees 80 (nous y residions a ce moment) et au couvent des oiseaux...

Bien que pouvant choquer (devant, meme), je trouve que c'est tres interessant de voir pour comprendre. L'atmosphere est tres pesante, les murs sont marques. Ne dit-on pas au Japon que les objects ont une ame?

Screeny

Citation de: Sebas_ le Juin 28, 2017, 20:26:06
Ce lieu est evidement dans ma liste de to do, merci du partage de ces photos!

Pour info, j'ai perdu mon arriere grand-pere dans le meme genre de conditions, lors de l'occupation de l'Indochine par les japonais. Mange par des rats pour la version officielle... Ma grand mere a passe 2 ans dans un couvent proche de Dalat (couvent des Oiseaux), bloquee dans la jungle avant de prendre le bateau pour rentrer en France.
Grand moment lorsque nous sommes retournes avec elle dans ce qui est maintenant "le musee des atrocites americaines" a Saigon dans les annees 80 (nous y residions a ce moment) et au couvent des oiseaux...

Bien que pouvant choquer (devant, meme), je trouve que c'est tres interessant de voir pour comprendre. L'atmosphere est tres pesante, les murs sont marques. Ne dit-on pas au Japon que les objects ont une ame?

Je l'ai visité aussi. Effectivement : atmosphère pesante, ambiance lourde mais tout cela fait partie du devoir de mémoire.  ;)

Rori

Je ne suis pas allé à Phnom-Penh et n'ai donc pas pu visiter ce lieu. Je me rappelle très bien de cette série que Sceeny avait  postée sur un autre fil et qui m'avait déjà beaucoup impressionnée. On se demande toujours comment des êtres humains peuvent sombrer dans une telle horeur et pourtant ces situations se renouvelles (à divers degrés) encore et toujours ...

Screeny

Citation de: Rori le Juin 28, 2017, 21:49:33
Je ne suis pas allé à Phnom-Penh et n'ai donc pas pu visiter ce lieu. Je me rappelle très bien de cette série que Sceeny avait  postée sur un autre fil

... et qui a disparu de cette section du forum depuis parce que ça remontait à un bail. C'est pourquoi j'ai pensé opportun de le remettre ici.