On a connu la belle époque où, en achetant un logiciel sur CD ou DVD, on pouvait le réinstaller à loisir sur la machine de son choix, juste en saisissant un numéro de série. On a connu la moins belle époque où il fallait l’activer, puis négocier auprès de l(éditeur si par malheur le disque dur ou la machine rendait l’âme sans qu’on ait pu désinstaller. On a connu les "suites" logicielles, comprenant une bardée de logiciels et d’outils dont on n’avait pas forcément besoin, mais dont l’achat coûtait tout de même moins cher que l’addition des deux ou trois dont on avait besoin. On a connu ces mises à jour périodiques, quasiment annuelles, que l’on pouvait différer dans le temps quand on les estimait trop coûteuses, sans pour autant cesser de travailler. Et puis est arrivé le… cloud!
Au départ, l’idée est bonne: plutôt que de vendre des coffrets ne servant finalement à rien d’autre qu’à transporter un numéro de série… vu qu’à peine les logiciels installés il fallait charger une mise à jour, Adobe a eu l’idée de proposer ses logiciels en abonnement. On paie un forfait mensuel, moyennant quoi on accède à un certain nombre de logiciels qui se mettront à jour tout seuls. C’est plutôt pratique et pas bforcément ruineux comparé aux prix historiques des fameuses "suites". Visiblement le système a plu… tellement qu’Adobe vient de décider de le généraliser et de cesser la vente de ses logiciels à l’unité: désormais, il faudra les louer… en s’abonnant!
Désormais, on n’achète plus, on loue!
De prime abord, c’est tentant: au lieu de mettre 1000€ sur la table pour acheter Photoshop (oublions les centimes!), on s’abonne sans mise de départ et on sera prélevé, chaque mois, de 25€. Tentant. Mais on fait les comptes: 25 x 12, cela donne 300 euros par an, ce qui n’est pas rien. Dans la foulée, on s’apeçoit aussi que si on a besoin de deux logiciels Adobe, il vaut mieux souscrire l’offre complète. Et là, bingo, le Creative Cloud passe à plus de 738€ par an! Pour un pro, c’est déjà une somme; mais pour un particulier, c’est carrément insupportable.
Mais il y a pire: si on décide de sortir du système et que l’on cesse l’abonnement… on perd tout! Adieu beaux logiciels, adieu jolis outils… il ne nous reste que nous images, pour peu qu’elles n’aient pas été enregistrées dans un format propriétaire. Et là, ça coince. Et ça coince d’autant plus qu’Adobe ne laisse pas le choix: c’est l’abonnement ou rien ce qui, pour de nombreux utilisateurs, apparaît comme un véritable piège.
Dès l’annonce de ces nouvelles mesures, des protestations se sont élevées dans tous les pays du monde, obligeant Adobe à tenter de calmer le jeu en expliquant que Lightroom resterait à jamais en dehors de ce sytème. Il n’empèche que le doute s’est installé et que cette bascule vers l’abonnement forfaitaire faitb prendre conscience à tous les utilisateurs du danger qu’il y a à mettre tous ses œuds dans le même panier. L’utilisateur ayant choisi, d’enregistrer tout son travail dans un format propriétaire Adobe n’aura donc d’autre choix que de payer à vie sa redevance à Adobe, sous peine de tout perdre! D’où la nécessité de veiller à toujours conserver une version "standard" (si tou!tefois ce terme a un sens) de sa production.
Au-delà des protestations, sans doute vaines, les utilisateurs doivent donc désormais choisir leur camp. Et en cela, il n’existe que quatre solutions possibles:
– accepter de passer par les fourches caudines d’Adobe et se soumettre à la taxe annuelle de 738€, en prenant bien garde à n’enregistrer aucune donnée sous forfait propriétaire Adobe, au risque de ne plus pouvoir les ouvrir si, un jour, l’abonnement est arrêté;
– pour les possesseurs de licences "achetées", de logiciels individuels ou de suites CS, tenir en lieu sûr numéros de licences, CD/DVD ou versions téléchargées des logiciels, qui resteront sans doute fonctionnels durant de longues années. Mais aussi ne surtout pas entrer dans le système Creative Cloud, au risque de voir son gestionnaire de licences (Adobe Application Manager) désactiver les versions antérieures!
– se limiter aux seuls logiciels Adobe vendus hors Cloud. C’est le cas, actuellement, de Photoshop Elements et de Lightroom qui, tous les deux, sont en mesure d’assurer 99% des besoins d’un photographe (la version complète de Photoshop ne comporte, en pratique, que très peu de fonctions absentes d’Elements et réellement indispensables pour la photo)
– rechercher des solutions tierces, autres que Adobe. Pour le traitement des fichiers RAW, l’exclennet DxO et les logiciels fournis ou vendus par les fabricants d’appareils remplacent admirablement bien Lightroom. Pour la retoiuche, le montage, les solutions sont tout aussi nombreuses (un peu moins sur Mac que sur PC). Quant aux fonctions de classement/catalogue, là encore il existe des alternatives nombreuses.
Chacun remarquera que nous n’avons pas évoqué le cas des innombrables versions piratées, toujours fonctionnelles mais que la vogue des tablettes, des OS "bétassons" (traduire par "bloqués de toutes parts, façon iPad) risque de rendre bien vite obsolètes.
Notre conclusion
Il est évident que la décision d’Adobe apparaît, comme beaucoup, comme un dictat peu commercial et très onéreux car au-delà des premiers mois d’essais, pour lesquels Adobe fait un petit effort, son Creative Cloud coûtera une fortune. 738€ par ans… c’est une redevance énorme qui va creuser un fossé entre amateurs qui ne suivront pas et professionnels bien obligés de passer par là. On peut aussi craindre que ce coup d’essai marque un tournant dans l’histoire des logiciels et qu’à l’avenir, d’autres éditeurs cherchent à nous faire payer au mois, à l’heure, voire à l’image. Adobe vient de lâcher un sacré pavé dans la mare: de la docilité ou du niveau de résistance de ses clients dépendra la suite.