Poterie Ernenwein à Marmoutier

Démarré par seba, Septembre 18, 2016, 08:48:12

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Petit reportage à la poterie d'art Ernenwein à Marmoutier en Alsace.
J'ai pris toutes les images au fisheye, ça manque un peu de variété.
Je vais répéter ce que le potier m'a raconté, comme un compte-rendu scolaire.
La poterie a été fondée en 1932 par M. Ernenwein père, en cet endroit car sur ce terrain il y a de l'argile.
Il y travaillait avec son frère jusqu'à la guerre pendant laquelle son frère malgré-nous est mort en Russie.
Après la guerre, au plus fort de l'activité, il avait jusqu'à 5 employés.
Puis l'affaire a été reprise par son fils qui travaille seul.

L'argile était extraite sur place puis stockée dans une fosse extérieure de "pourrissement" où elle reste un an, après quoi on la prélève pour utilisation.
A présent M. Ernenwein fils l'achète ailleurs.
Ici on voit le premier atelier, avec trois machines : au premier plan (avec la grande roue) la malaxeuse, à droite deux tambours en porcelaine pour fabriquer les émaux, au fond à gauche derrière la malaxeuse, le tambour pour fabriquer la barbotine.
Toutes ces machines fonctionnent comme en 1932, avec un arbre au plafond et des courroies, arbre actionné par le moteur électrique d'origine.

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Utilisation de la barbotine (une boue d'argile très fine) : on la verse dans un moule en plâtre.

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Après quelques heures, le plâtre a absorbé l'eau, on verse l'excès de barbotine, une couche de 5mm environ reste dans le moule.
Plus tard on démoule et on a par exemple une statuette creuse, à cuire après séchage.

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Une vue du deuxième atelier qui comprend : tour - moules - émaux - dorure - fours.

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Potier au tour. Arriver à être potable dans cet exercice demande à peu près 5 ans de pratique.
Après 3-4 jours de séchage, on fait quelques retouches et on rajoute l'anse (avant l'argile est trop molle).
Puis on laisse sécher 3-4 semaines avant de cuire.

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Le four d'origine en briques réfractaires, à gauche. Il a servi jusque dans les années 60.
Il comprend deux chambres, une chambre inférieure (première cuisson) et une chambre supérieure (cuisson des émaux). La conception du four est tout un art car par exemple quand la température dans la chambre inférieure est de 980°, dans la chambre supérieure elle doit être de 1030°, ceci avec un seul foyer alimenté avec des briquettes de charbon.
Le four absorbe 3 ou 4 mois de production, il y a donc 3 ou 4 cuissons par an. Il ne faut pas se louper car une cuisson ratée ruine plusieurs mois de travail.
La cuisson dure de 24 à 36 heures. Elle demande 2,5 tonnes de charbon et une présence permanente.
La maîtrise et le contrôle de la température sont délicats, le contrôle se fait avec des matières fusibles témoins, qu'on observe par une petite ouverture dans la porte du four.

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Le four électrique. Plus petit, plus souple, plus facile. Il y a 3 zones (bas-milieu-haut) dont on peut régler différemment la température. On fait peut-être une cuisson par semaine.

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Les émaux. Achetés ou préparés. Après application sur la poterie cuite, ils demandent une deuxième cuisson à plus haute température pendant laquelle ils se vitrifient.
M. Ernenwein fait également de la dorure : sur la poterie émaillée on peint le motif avec une mixture composée d'or dissout dans de l'eau régale, du goudron et d'essences de plantes, ça sent très bon.
Puis au four pour une troisième cuisson, tout s'évapore sauf l'or.
M. Ernenwein arrive bientôt à la retraite et il n'y a pas de repreneur, a priori cet atelier va cesser son activité.

Un grand merci à lui pour nous avoir ouvert les portes de son atelier (journées du patrimoine) et passé deux heures à tout nous expliquer.