Pour être “acceptée” (=publiable), la violence doit être “belle”

Démarré par muadib, Janvier 30, 2014, 19:33:11

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Arnaud17

Est il possible que la violence en Ukraine soit plus photogénique qu'ailleurs ?
veni, vidi, vomi

Daedalus

L'être humain n'a pas changé. La méthode romaine avec les jeux du cirque n'a pas changé.
Il suffit de mettre un filtre entre le spectateur et le sujet pour que tout passe.

Sinon oui; ces photographes ont le sens du moment pour sortir le bon cliché.

Daedalus

Ajout: Toute la subtilité est d'avoir un sujet où le spectateur peut s'identifier.

Autre piste de l'acceptance de ces situations : le spectateur/lecteur est tellement blasé qu'il passe par dessus dans la majorité des cas quelle que soit l'horreur ou la tension de la scène.

« La mort d'un homme est une tragédie. La mort d'un million d'hommes est une statistique.  » - Staline

Rude mais vrai.  :-\

rico7578

Comme le dit le jeune photographe Corentin Fohlen :
"L'information passe par le sens: comment faire passer le sens journalistique sans émotion? C'est comme si un rédacteur décrivait un événement sans y mettre la syntaxe, la ponctuation, avec un vocabulaire approprié"

Et il n'a pas tord à mon avis. Sans émotion, donc image photogénique, le message ne passe pas aussi bien. Cela n'interpellerait personne, car on détournerait le regard.

Moi ce qui m'interpelle toujours avec le photojournalisme de guerre (bon ok c pas encore vraiment une guerre ici, mais bon c pas loin et d'ailleurs là n'est pas mon propos) c'est pourquoi en temps de paix dans leur pays, certains sont prêt à aller risquer leur peau dans un pays en guerre.
Le gout du risque ? De se sentir vivant ? Surement qqchose comme ça je pense. (seulement la volonté d'informer, je n'y crois pas)

Citation de: Arnaud17 le Janvier 30, 2014, 19:58:55
Est il possible que la violence en Ukraine soit plus photogénique qu'ailleurs ?

Toi t'as répondu sans avoir lu l'article apparemment... ;)
Ils y disent notamment que la lumière est bcp plus jolie que celle, dure, lors des évènements en Egypte.
Neige, feu, gueules noires, formations en tortue, barricades, lumière rasante, toute l'action se déroulant en un même endroit bien délimité... etc, font que oui c'est plus photogénique qu'ailleurs où se genre d'événements peu avoir lieu.

mattbr

"L'information passe par le sens: comment faire passer le sens journalistique sans émotion? C'est comme si un rédacteur décrivait un événement sans y mettre la syntaxe, la ponctuation, avec un vocabulaire approprié"

Non. Enfin oui, mais en fait, non, en partie parce qu'il répond à la mauvaise question (c'est pas de sa faute). Et en partie parce qu'à voir la version publiée de la réponse qu'il donne (n'excluons pas qu'une réponse plus complète ait pu être coupée au montage), il se plante totalement - "l'émotion" (du photographe) n'a rien, mais alors rien à voir là-dedans.

Une image, comme tout message, ne peut être compréhensible que si l'émetteur (le photographe) et le récepteur (le public) partagent des codes (une grammaire) communs.

Il se trouve que les codes de représentation du conflit sont, pour des raisons historiques, en grande partie hérités de la peinture. Pour des raisons encore une fois historiques, cette peinture (et notamment la peinture de bataille, mais pas que...) glorifie la guerre - la sublime. Pour signifier "guerre", l'on se retrouve donc dans le paradoxe pervers d'avoir un récepteur qui trouve l'image "belle", mais la cause n'en est pas inhérente à la représentation photographique, elle est la fonction d'un contexte social.

La question de fond est donc "pourquoi est-ce que, socialement, l'on trouve la guerre belle" ?
Citation de: rico7578 le Février 04, 2014, 15:34:34
Moi ce qui m'interpelle toujours avec le photojournalisme de guerre (bon ok c pas encore vraiment une guerre ici, mais bon c pas loin et d'ailleurs là n'est pas mon propos) c'est pourquoi en temps de paix dans leur pays, certains sont prêt à aller risquer leur peau dans un pays en guerre.
Le gout du risque ? De se sentir vivant ? Surement qqchose comme ça je pense. (seulement la volonté d'informer, je n'y crois pas)

Il y a autant de raisons d'aller au carton que de photographes. Elles sont multiples, complexes, et, effectivement, la seule volonté d'informer, c'est du pipeau.

Citation de: rico7578 le Février 04, 2014, 15:34:34
Ils y disent notamment que la lumière est bcp plus jolie que celle, dure, lors des évènements en Egypte.
Neige, feu, gueules noires, formations en tortue, barricades, lumière rasante, toute l'action se déroulant en un même endroit bien délimité... etc, font que oui c'est plus photogénique qu'ailleurs où se genre d'événements peu avoir lieu.

Mouaich, très probable pour la lumière (j'en sais rien, j'ai pas été aux manifs en Ukraine).

Par contre, l'argument de la délimitation géographique, c'est n'importe quoi, et je me demande d'ailleurs si c'est pas l'inverse de la réalité. L'Egypte, c'était vachement délimité aussi : en gros, la Place Tahrir, point barre, y'avait du pro-Mubarak assez hostile aux blancs en-dehors. Ca fait probablement une autre grosse différence non-dite en Ukraine : il doit, instinctivement, y avoir une empathie plus importante ne serait-ce que pour des questions culturelles, d'une part, et, de l'autre, la possibilité de se balader un peu plus facilement en-dehors de la manif' qu'en Egypte (juste parce que, ben, les européens sont pas forcément immédiatement identifiables par le premier abruti fanatisé d'un côté ou de l'autre - quand on rajoute au mélange la propagande qui explique que tous les journalistes sont des espions (à commencer par ceux avec des gros appareils) qu'il y a(vait) en Egypte, ça donne probablement des conditions de travail un peu plus cool).

Arnaud17

Citation de: rico7578 le Février 04, 2014, 15:34:34

Toi t'as répondu sans avoir lu l'article apparemment... ;)
Ils y disent notamment que la lumière est bcp plus jolie que celle, dure, lors des évènements en Egypte.
Neige, feu, gueules noires, formations en tortue, barricades, lumière rasante, toute l'action se déroulant en un même endroit bien délimité... etc, font que oui c'est plus photogénique qu'ailleurs où se genre d'événements peu avoir lieu.

Tu me fais un procès d'intention parce que j'ai soulevé l'aspect photogénique avant toi ?
Penses tu être seul à reconnaitre une "bonne" lumière ?
Fais attention de ne pas te faire écraser par ton humilité.
veni, vidi, vomi

geargies

Effectivement on pourrait commencer par relire les Salons de Diderot.  ..

rico7578

Citation de: Arnaud17 le Février 06, 2014, 14:42:47
Tu me fais un procès d'intention parce que j'ai soulevé l'aspect photogénique avant toi ?
Penses tu être seul à reconnaitre une "bonne" lumière ?
Fais attention de ne pas te faire écraser par ton humilité.

Ahah trop fort celle là :)
J'ai rien dit, sauf que tu n'avais pas bien lu l'article au vu de ton commentaire, car ton interrogation est clairement exposée dans l'article. J'ai jamais dit que je savais reconnaître une bonne lumière, j'ai juste dit que l'article explique pourquoi ce lieu est plus photogénique qu'un autre ! Il suffit de le relire
Mais bon apparemment j'ai froissé ta susceptibilité à fleur de peau !
Pour te paraphraser je pourrais dire : "Fais attention de ne pas te faire écraser par ta susceptibilité"

rico7578

Citation de: mattbr le Février 06, 2014, 14:32:59
il se plante totalement - "l'émotion" (du photographe) n'a rien, mais alors rien à voir là-dedans.

Je crois pas qu'il parlait de l'émotion du photographe face à  la scène qui se déroule devant lui, mais de l'émotion qu'il cherche à faire passer au près de la personne qui regarde l'image qu'il a fait.
En gros, si il photographie "basiquement" (disons mal) une scène incroyable, personne ne percevra qu'elle est incroyable justement, car elle ne véhiculera aucune émotion, elle (et donc son message) passera inaperçue.

(A l'inverse ceci dit, il se peut aussi que le photographe "sur-dramatise" une scène à laquelle il assiste, et le message passé peut alors aussi être biaisé.)

mattbr

Citation de: rico7578 le Février 10, 2014, 16:17:44
Je crois pas qu'il parlait de l'émotion du photographe face à  la scène qui se déroule devant lui, mais de l'émotion qu'il cherche à faire passer au près de la personne qui regarde l'image qu'il a fait.
En gros, si il photographie "basiquement" (disons mal) une scène incroyable, personne ne percevra qu'elle est incroyable justement, car elle ne véhiculera aucune émotion, elle (et donc son message) passera inaperçue.

(A l'inverse ceci dit, il se peut aussi que le photographe "sur-dramatise" une scène à laquelle il assiste, et le message passé peut alors aussi être biaisé.)

Je pense que tu te plantes.

petits exemples comparés sur un sujet identique - un utilise des codes très spectaculaire ("émotionnels"), l'autre une photographie plus... distante, disons :

Ad van Denderen

Eva Leitolf