Droit à l'image, quelle limite ?

Démarré par Izno91, Avril 01, 2010, 19:43:38

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Izno91

Bonjour

Jeune photographe amateur, j'ai pris une photo d'un gamin lors d'un carnaval. Ce gamin est grimmé et difficilement reconnaissable (j'imagine que ses parents n'auront aucune hésitation à le reconnaître s'ils le voyaient), et je me demandais dans quelle mesure je pouvais utiliser cette photo dans mon club, sur le site internet du club ou dans une exposition (d'amateurs), sans utilisation commerciale.

Les infos que j'ai pu glaner sont un peu contradictoires en fonction de certains facteurs :

- La personne souhaitant diffuser une image d'une personne physique (même dans un endroit public) doit recueillir un accord écrit, faisant mention expresse de la prise de l'image ET de sa diffusion.

- Photo prise dans un lieu public : Le fait que la personne prise en photo soit dans un lieu public n'a aucune conséquence si elle apparaît de manière isolée grâce au cadrage réalisé par le photographe (Civ. 1re 12 décembre 2000, Bull.civ.I, n°322). <- Le cadrage isole l'enfant dans mon cas.

- Pour publier une photo de mineur, il faut l'accord exprès des deux parents. <- Je ne sais même pas qui est ce gamin

Il existe des exceptions à cette obligation :

- Accord tacite : L'accord tacite peut se déduire du comportement de la personne. Mais ce cas est strictement limité aux personnes publiques dans le cadre de leurs activités publiques. <- Peut on considérer que mon clown est un personnage public le temps de ce défilé de carnaval ?

- Le droit à l'information : Le droit à l'information permet de limiter le caractère exclusif du droit à l'image si l'image illustre l'événement d'actualité. Il autorise la publication d'images de personnes impliquées dans un événement. <- mon image illustre le carnaval, mais n'informe pas vraiment (pas de diffusion dans la presse, etc)

Je vous remercie d'avance de votre éclairage, je tiens la photo à disposition pour un avis adapté à la photo, mais la question se veut un peu plus générique :)

Zouave15

Il n'y a pas que le droit à l'information, il y a la liberté de créer :

La liberté de créer enfin supérieure au droit à l'image !

et en plus comme tu dis, c'est un clown. S'il n'est pas dans une position dégradante, no problem.

Lictor

C'est une excellente nouvelle!

Je me posais la question pour certaines de mes photos, normalement, je dois être couvert malgré l'absence d'autorisation?

Notamment mes photos de manifestations (Gay Pride, Techno Parade...). Faire signer des autorisations est quasiment impossible, à moins d'escalader les chars, de fendre la foule à la poursuite du sujet ou d'hurler par dessus les sonos. Mais normalement, je suis couvert par le fait de faire des photos dans le cadre d'une manifestation publique? Y compris en cas de cadrage serré?

La question se pose aussi pour le théâtre de rue, mais ça doit aussi rentrer dans le même cadre? A moins qu'il y ait une notion de droit d'auteur lié à l'oeuvre représentée?

Zouave15

Oui, Lictor, attention quand même aux demoiselles nues, photos qui pourraient être considérées comme dégradantes

Lictor

En même temps, la nudité, qu'elle soit au théâtre ou lors de manifestations type Techno Parade ou Gay Pride, est toujours affirmée, assumée voire revendicatrice... Elle n'est jamais volée, puisqu'offerte à tous. Du coup, je vois mal comment elle pourrait être considérée comme dégradante? D'ailleurs, sur ce genre de manifestation, trouver une image qui y serait prise comme dégradante reviendrait à contredire l'essence même de l'événement...

geargies

Ça dépend aussi de l'intention, que le juge ira aussi chercher dans la légende. Ex y'a une différence entre " les gays en manif arc en ciel" et " les rues envahies par des invertis sous les yeux de nos enfants... " et je fais léger

LyonDag

Attention : le droit à l'information est à faire valoir si tu travailles en tant que photojournaliste... pas autrement.
Et la "liberté de créer" ne peut être mise en avant que dans une démarche artistique "globale", un "projet cohérent" si tu préfères, que tu poursuis sur plusieurs semaines/mois/années, dans le but d'une exposition/livre/recherche sur un thème ou autre.
Dans ton cas précis, une manifestation publique...à laquelle les parents avaient donc autorisé le gosse de participer, je ne pense pas que ça pose un problème quelconque. Mais à toi de voir.

Zouave15

Non, le droit à l'information est plus large.

Il y a une différence entre le droit des journalistes, encadrés par des usages professionnels, une éthique, etc., qui peuvent aller assez loin et sont a priori protégés, et le droit du quidam à informer ou commenter tout événement.

Mais ledit quidam a quand même pas mal de droits, ceux qu'on a dans une démocratie, dans les respect des autres donc. Au-delà des fantasmes et des légendes urbaines qui prétendent qu'on ne peut rien publier, il y a simplement une question de logique.

Quant à la liberté de créer, elle s'entend également dans un sens large et n'est pas réservée aux auteurs patentés ou aux artistes conceptuels.

Sevgin, last viking of Sweden

#8
le probléme aussi dans le cadre d'une manisfestation publique "à la vue de tous" ne veut pas dire necessairement qu'on peut peut enregister une image et la diffuser comme on l'entend aussi.

La personne, par exemple, sein nu qui défile le temps d'une parade, sait ce qu'elle fait: elle montre sa nudité ou autre le temps de cette parade... donc ce n'est pas dit pour autant qu'elle accepte d'être sur tous les blogs, dont les auteurs postent pour dire "j'y étais".

Bref du cas par cas, parfois il y a des attitudes qui font penser que...

Aprés il faut le ratio emmerdes/bénéfices de publier une photo:
certains et probablement la plupart des interressés seront contents...
et d'autres ne voudront pas de diffusion: si ces derniéres peuvent exprimer au bloggeur leur refus et celui accepte de supprimer, ça ne devait pas aller trop loin.

Pour les inquiets, quant à la formalité de demander une autorisation à chaque participant, eh bien c'est vache à dire... mais c'est le probléme du photographe. ( Mais rien n'empeche de prendre contact avec l'organisateur pour savoir ce qu'il en est, vis à vis des participants!)
ᚳᛊᛋ ᚦᚱᚣᛕᛕᚣᚱᛋ ᛋᛜᚺᚾ ᛋᛘᛖᚹᚣᛋ

Lictor

Citation de: Sevgin, last viking of Sweden le Avril 03, 2010, 10:00:32
Pour les inquiets, quant à la formalité de demander une autorisation à chaque participant, eh bien c'est vache à dire... mais c'est le probléme du photographe. ( Mais rien n'empeche de prendre contact avec l'organisateur pour savoir ce qu'il en est, vis à vis des participants!)

Euh, comment dire... L'organisateur d'une manifestation ouverte au public qui rassemble plusieurs centaines de milliers de personnes chaque année n'a pas la moindre idée de qui sont les participants! C'est comme aller demander à la CGT le nom des personnes présentes à la manifestation du 1er mai...
Sans compter que si l'on s'inquiète des dommages que pourraient causer l'exploitation de l'image, je te laisse imaginer ceux que pourraient provoquer la divulgation d'une liste nominative complète des manifestants par l'organisateur!

Quant à savoir de qui s'est le problème, c'est l'objet de la discussion... Si la justice reconnait une supériorité du droit à informer ou à créer sur le droit à l'image, non, ce n'est du coup plus le problème du photographe! On sort de l'obligation légale pour rentrer dans le domaine de la pure courtoisie - offrir des tirages quand les gens se reconnaissent et se manifestent, être ouvert à la possibilité de retrait d'une image à l'amiable quand la personne le demande poliment et explique en quoi elle pose problème...

Sevgin, last viking of Sweden

Un organisateur peut dans ses conditions, stipuler que les participants acceptent d'être pris en photo et si un n'est pas d'accord, qu'il s'exprime bla bla....

UN organisateur peut donner l'exclu à un photographe et bla, bla, bla

bref, à ce jour, il n' y a pas une réponse absolue.

Simplement que beaucoup font malgré tout des photos et dés qu'on se pose des questions, bah le constat est que: les reponses ne conviennent pas aux photographes amateurs qui veut diffuser. ;D
*************
NB j'ai dit "amateur" non pas pour provoquer le débat recurrent et stupide "pro // amateur" mais partant du principe que le pro est en commande, dans ce contexte et le fait soit dans le but de l'info, ou commande organisateur, sponsor et que souvent les visages sont floutés au cas où.
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Henri34

Citation de: waldokitty le Avril 03, 2010, 12:12:24
Pour ma part aucune limite. Je prends tout ce que je veux. J'attends qu'on m'assigne.

C'est une solution  :D

Je pense qu'il faut avoir à l'esprit plusieurs choses:

Tout dépend beaucoup de l'usage qui est fait de la photo : sa légende, l'étendue de sa diffusion, son aspect commercial ou non, démarche artistique, importance du personnage dans la photo. Bref, comme ce ne sont que des jurisprudences qui évoluent sans cesse, sans tomber dans la parano, il faut rester prudent et bien maitriser la diffusion de la photo.
Être très prudent avec des mineurs.

Alain-P

Merci à tous pour ces informations et réflexions. Amateur pratiquant beaucoup, réunissant mes photos par thème, jamais publié mais "travaillant" pour le plaisir, je viens de me faire engu**er par un peintre dans un parc qui figurait au premier plan d'une photo de plan large, prise au 35, de l'une des pelouses de ce parc.

Même si l'on est à peu près sûr de son droit c'est très désagréable d'être ainsi interpelé au milieu d'autres passant, il serait bon que l'information circule afin que chacun d'entre nous sache, qu'en un lieu public, son image peut faire partie d'une photo.
Perpétuel insatisfait.....

JMS

Tu lui as demandé, au connard, si les personnes qu'il dessinait sur ses tableaux lui avaient signé une autorisation de publication, s'il avait les droits du paysagiste ayant dessiné la pelouse du parc, etc ? Avec moi cela n'aurait pas loupé  ;D ;D ;D

Jc.

... et une autorisation de la mairie pour poser son chevalet ...  Ça m'est arrivé 2 fois de suite à Paris.
La 1ere c'est un jeune qui taguait consciencieusement un t shirt sur un chevalet devant une boutique (de t shirt) près des Halles. Lorsqu'il a entendu le 2nd déclic il s'est mis en rogne. Le pire c'est que je lui avait demandé doucement pour ne pas le déranger et qu'il n'avait pas entendu. Je me suis excusé, lui ai fait voir et proposé de les effacer. Finalement il m'a donné le mail de la boutique pour laquelle il faisait ça et je leur ai envoyé.
2 jours plus tard un peintre dans un parc. Là c'est moi qui me suis mis en rogne et qui lui ai demandé son autorisation de la mairie pour poser son chevalet. Il a changé de ton...

Ps : La photo du jeune : http://pagesperso-orange.fr/jcm./Galerie/Gens/slides/Paris2%20182W.html#picttop