Procédés anciens et image numérique

Démarré par esox_13, Février 07, 2016, 11:27:53

« précédent - suivant »

esox_13

Je pense que c'est sur ce fil qu'il est le plus pertinent d'aborder ce sujet. En effet, les procédés anciens sont plus l'apanage du MF et surtout du GF que des petits formats (please, que le utilisateurs de 24x36 ne partent pas au 1/4 de tour sur le terme "petit format"...  ;D).

Suite au partage d'Elscode au sujet du magnifique travail de Leonard Missone, un des grands acteurs du mouvement pictorialiste engendré par des photographes amateurs qui visait à donner le statut de beaux arts à la photographie, je trouve que le débat autour de la façon d'utiliser les potentialités du traitement numérique pour aller dans ce sens pictural est intéressant : est-il pertinent d'utiliser ce traitement numérique pour "faire comme" les procédés anciens ou bien doit-on laisser à Cesar ce qui est à Cesar et utiliser le traitement numérique uniquement pour explorer d'autres voies, et lesquelles. Parce que tout de même, le mauvais goût peut vite pointer son nez, en argentique comme en numérique (exemple les nus vaporeux de David Hamilton, oui je sais là je risque de ne pas me faire que des amis  :D).

Pour moi le débat est loin d'être manichéen, en effet on peut avec bonheur mélanger les deux univers : à partir d'une image numérique on tire un transparent qu'on utilise comme négatif (ou positif) avec des procédés anciens par contact. Et ce n'est qu'un exemple.

Ensuite je pense qu'il faut considérer la part du rendu dans la pertinence de l'image : prenons une image de Missone par exemple, si on refait la même image avec nos MF préférés (argentines ou numériques) développée et tirée de façon standard, aura-t-elle la même force ? Et ensuite on peut inverser le regard, l'ami Léonard, lorsque il a pris sa photo, avait-il intégré son processus de traitement lors de la composition de son image ?

En numéque on a facilement tendance à penser qu'on doit avant tout capturer le maximum d'informations possibles et ensuite "on verra". Ouais, je partage de moins en moins ce point de vue. Pour un rendu de type "photographique" (haha), passe encore. Mais dans une démarche plus pictorialiste est-ce toujours pertinent ?

Bref, après "l'ubérisation" de la société, devons céder à "l'instagrammisation" de la photo ?

elscode

#1
Je vais faire des réponses courtes :

- Numérique vs procédés anciens/argentique : strictement le même combat. La démarche est un aspect plasticien, cela requiert de la recherche dans toutes les pratiques. Penser qu'il suffit de faire de l'argentique pour avoir un rendu photographique/plasticien/pictorialiste. . . c'est une illusion. Il  a aussi beaucoup de travail à engager pour trouver sa voie en argentique.

- Je ne ressent pas de besoin d'imiter en numérique ce qui existe en argentique. PAR CONTRE, je suis attaché à ce qu'il y ai une démarche plasticienne. Un rendu lisse, froid et très formaté numérique me convient rarement (ça fonctionne parfois avec certains sujets).

- Prise en conte du procédé dans la réflexion ? Oui bien sûr. Le rendu est un levier très fort dans la construction d'une image et de ce qu'elle doit transmettre.

- Je n'ai aucune religion numérique vs argentique. Même si à titre personnel c'est de plus en plus dans l'argentique et les procédés anciens que je trouve du plaisir à pratiquer et que je trouve l'aspect plasticien qui me plait.

elscode

- je rajoute que là où certains verront juste un effet "vieillot", j'y vois surtout un côté intemporel.

Surtout si le choix d'un procédé ancien est associé à une démarche très minimaliste et très graphique.

Ma publication "retro" est un parfait exemple de ce que je considère comme à la fois rétro, mais suffisamment intemporel grâce au minimalisme et au rendu presque "dessin".

http://www.chassimages.com/forum/index.php/topic,248344.0.html

Voilà, my 50 cents

esox_13

Justement cet aspect plasticien, tu penses qu'il est possible de l'obtenir dans une chaine numérique complète ?

elscode

oui, absolument.

Si je disais le contraire, le travail de nombreux photographes qui bossent en numérique me ferait mentir  ;)

esox_13

Je parlais de la matière. Une gomme bichromatée ou un collodion ou un papier au sel ont un aspect bien  particulier. Je ne parle pas d'un tirage argentique classique.

elscode

#6
Je ne parle pas non plus de tirage argentique classique. Je parle UNIQUEMENT de rendu plasticien, ce qui n'est pas la panacée des procédés argentique.
Je suis complètement sorti de cette logique de vouloir imiter pour obtenir un rendu plasticien en numérique.

Imiter un collodion ou une gomme bichromatée à partir d'une photo numérique . . . bof . . . j'ai pas le souvenir d'avoir vu une imitation concluante.
Le risque est de donner très vite un désagréable effet de "essais raté de simulation". Surtout avec ces procédés au rendu très caractéristique.

Jouer à simuler un tirage argentique classique, au rendu finalement très calibré, me parait moins risqué et on voit des choses au rendu tout à fait satisfaisant.
Il y a des photos ou j'aurais vraiment du mal à dire si c'est du "vrai" argentique ou une photo numérique bien caractérisée.

Mais je le répète, une simulation réussie d'un tirage argentique, n'est en rien un critère de qualité. C'est un choix, parmi beaucoup d'autres possible.
Il y a des rendu plasticiens que je trouve très joli et qui ne ressemblent à rien de connu parmi les procédés argentique ou anciens.

landscapephoto

Une petite remarque sur un sujet que je connais bien avant de quitter le forum. Leonard Missone et les pictorialistes de l'époque utilisaient des objectifs particuliers pour le rendu de leurs images. Il s'agissait d'optiques dont les lentilles étaient retouchées à la main pour donner ces effets particuliers. Le fabricant le plus célèbre est Pinkham & Smith. Il est très difficile d'imiter le même rendu avec des optiques modernes. Si tu veux obtenir ce rendu particulier, il faut utiliser des optiques de l'époque.

Sur les tirages: non seulement les procédés anciens on aussi un aspect unique, mais ils se vendent très bien en galerie à cause de l'aspect artisanal des épreuves. Il y a un vrai marché pour ce type de produit actuellement.

esox_13

Tout comme faire un virage sépia "à l'ancienne" en numérique. Quel intérêt ? Sauf si bien entendu il est partie d'un ensemble de traitements impossibles en argentique. Je pense que c'ets plus sur les procédés anciens que le monde analogique est pertinent. Ou pour l'utilisation de matériel comme la chambre grand format qui permet des choses uniques/ sauf bien entendu si c'est pour faire ce que le numérique peut faire. Mais j'ai vu des travaux d'abstraction qu'il est plus simple à faire à la chambre GF qu'au réflex ou à la chambre MF.

Pour ce qui est des optiques je partage aussi ce point de vue. J'avais effectivement vu que les optiques étaient retravaillées à la main, mais je l'avais oublié. Et effectivement en galerie le côté artisanal a une très grande importance, ce qu'on peut comprendre si on intègre le concept d'oeuvre originale.

Georges G.

J aime bien le rendu de bruno aveillan en ce moment j essaye de bricoler des choses dans ce sens et de ce point de vue je pense qu il est possible d arriver a ce resultat avec des objectif recent. En adaptant une matte box avec la creation de filtre en different materiaux et avec differente opacite et avec differente diffraction, tout ca applique d une facon local ou global a l image.je suis en train de faire quelque essais en mf et les resultats sont interessant et peuvent aller dans le sens du photographe cite.en tout cas c bidoullage fond aussi parti de procede.

De toute maniere, un rendu ancien peut attirer et le chemin pour s y rendre passe par une multitude de carrefour qui au final nous amenes a un resultat qui nous est propre
De meme que pour un rendu numerique, mais je suis d accord la demande pour ces mediums  est aprendre en compte pour un photographe

esox_13

Surtout qu'elle est tout à fait légitime pour un collectionneur.

landscapephoto

Encore une remarque sur les objectifs utilisés par les pictorialistes du début du XXème siècle: les films de l'époque étaient orthochromatiques et les objectifs sont construits en conséquence. Sur des films modernes panchromatiques, les effets de flous ne correspondent pas à ce qui est attendu. Il faut soit utiliser des films anciens, soit corriger en conséquence.

Deux sites (américains) sur les objectifs d'époque:

http://www.antiquecameras.net/softfocuslenses.html
http://tonopahpictures.0catch.com

Une dernière remarque: les bons objectifs d'époque sont recherchés et donc chers.

esox_13

Tu as l'air de bien connaître le sujet... Super intéressant. Dans un premier temps je vais faire simple : utiliser des impressions sur transparent pour tenter deux trois trucs.

esox_13

#13
Il parait qu'il existe une version pdf de l'esprit des sels. (Edit : trouvé !)

JE vais aussi faire deux trois expériences avec des lentilles toutes bêtes, j'avais fait ça pour des éclairages et c'était bien sympa.

Georges G.


esox_13


landscapephoto

Pour les procédés anciens, on peut aussi se référer au traité de photographie d'Alphonse Davanne qui est dans le domaine public et peut se télécharger légalement sur le site de la bibliothèques de Nîmes (2 tomes de 600 pages):

http://bibliotheque-numerique.nimes.fr/search/search.php?author=Davanne%2C+Alphonse&

Il est d'ailleurs probablement aussi disponible à Marseille.

Plus actuel, mais en Anglais, les forums des américains passionnés...

esox_13

Super, merci pour le lien, je vais tout de même commencer par l'esprit des sels... En ce qui concerne les forums américains, tu en conseillerais certains en particulier ?

PS : tu as déjà tenté l'expérience de ce type de pratique à partir de fichiers numériques ?

elscode

#18
Attention la production de négatif numérique est plus compliquée qu'il y parait au premier abord.

Les 2 difficultés principales sont :

1. Obtenir des noirs suffisamment denses pour atteindre un contraste suffisant. Le contraste à atteindre est très dépendant du procédé de tirage envisagé. Mais très peux d'imprimantes ont des encres suffisamment dense pour les procédés kallitype, papiers salés (albuminés) et platino-palladium.

2. Il faut produire une courbe pour linéariser les contrastes. Les procédés anciens n'ont pas une distribution des tonalités linérairement  lié au négatif.

On se retrouve TRES rapidement avec des soucis de cassures tonales très marquée avec un processus pas parfaitement au point ou des encres inadaptées.

Il faut également des transparents de grande qualité. (j'utilise ceux que je trouve chez Disactis, ils sont parfait)

Il existe beaucoup de documentation sur le sujet. Encore une fois, la littérature anglophone est nettement plus riche sur ce sujet.

As-tu une idée du procédé de tirage que tu souhaites mettre en oeuvre ?

esox_13

Pas encore, je découvre, je vais partir du plus simple à mettre en oeuvre, du moins avec des ingrédients simples. Pour le moment je me documente. Tu as une suggestion pour découvrir cet "univers" ?

elscode

Ca dépend . . .

Tu as une insoleuse UV ?
Tu as un agrandisseur ?

Ou uniquement exposition au soleil ?

esox_13

Non, je n'ai plus d'agrandisseur, ça se passera simplement au soleil.

elscode

Dans ce cas je te conseille un procédé à image apparente lors de l'exposition.
Ca permet de contrôler l'exposition visuellement.

Démarrer par le cyanotype me semble une bonne idée pour 3 raisons :

- contrôle visuel de l'exposition
- peut fonctionner avec des négatifs de densité moyenne
- les chimies mises en oeuvres sont peu toxiques et peu cher.

Si le bleu profond dérange, il est possible de faire des virages très simplement avec des tanins (infusion de thé ou de chaton d'aulnes par exemple)

esox_13


elscode

Exemple de cyanotype avant/apres virage