Des migrants transportent un bébé alors qu’ils traversent le Rio Grande, le jeudi 11 mai 2023. © Jerry Lara/San Antonio Express-News

Avec la levée du « Titre 42 » par Joe Biden, les candidats à une nouvelle vie se font de plus en plus nombreux à la frontière americano-mexicaine. Et le Rio Grande (re)devient le théâtre de scènes sidérantes, comme cette traversée d’un nourrisson porté à bout de bras d’une rive à l’autre du fleuve. Le petit s’en sortira sain et sauf, mais le récit et les images de Jerry Lara font froid dans le dos.

DROIT D’INFORMER (1)
Selon Reporters sans frontières, autant de violences policières ont touché les journalistes couvrant les mouvements sociaux en deux mois que sur les deux années précédentes. À Rennes, le 15 avril dernier, la photographe Anna Margueritat a par exemple été braquée à hauteur du visage par un CRS avec son LBD. Le 1er mai à Paris, c’est le photojournaliste Marc Chaumeil qui a été jeté à terre et frappé par un policier d’une brigade d’intervention. Le rapport de RSF cite aussi l’exemple de Toufik-de-Planoise, retenu en garde-à-vue durant neuf heures, le 26 avril, après avoir photographié des manifestants sur une voie ferrée à Besançon.
 
DROIT D’INFORMER (2)
Le bruit médiatique qu’a fait le défilé néofasciste du 6 mai dernier à Paris n’est pas proportionnel au nombre de journalistes présents sur place pour couvrir l’événement. Quasiment pas de télés et très peu de photographes, à part Yann Castanier. Celui-ci couvre de longue date les mouvements d’extrême-droite et, pour cette raison même, il est souvent persona non grata lors de ce genre de manifestation. Rapidement pointé du doigt puis menacé, mal protégé par des forces de l’ordre en sous-effectif, il a dû ruser pour échapper au pire, comme il l’a raconté dans ce billet de Mediapart puis sur le plateau d’Arrêt sur Images
 
DROIT D’AUTEUR
Figure de l’appropriation art, Richard Prince a fait du détournement sa marque de fabrique. Mais il est sans doute allé trop loin en vendant à prix d’or de simples captures d’écran d’Instagram. Saisie par Eric McNatt et Donald Graham, deux photographes professionnels qui se sont fait « pirater » leurs comptes Instagram et donc leurs images par l’artiste, la justice américaine a estimé en première instance que « les altérations de Richard Prince n’avaient fait que modifier l’original sans le transformer ». Affaire à suivre…
D’un Prince à l’autre, une autre affaire de copyright vient de connaître son dénouement. Après sept années de procédure, Lynn Goldsmith a remporté son procès contre la fondation Andy Warhol. La photographe touchera donc des droits d’auteur pour la transformation de son portrait du Kid de Minneapolis par le peintre. Là encore, la Cour suprême des États-Unis a statué qu’Andy Warhol n’avait pas fait « d’ajouts ou de modifications » suffisants pour ne rien devoir à Lynn Goldsmith.
 
UN CENTENAIRE TOUJOURS ACTUEL
Richard Avedon aurait eu 100 ans le 15 mai. Dans le cadre d’une exposition célébrant cet anniversaire, le galeriste newyorkais Larry Gagosian a demandé à quelques personnalités de choisir leur photo préférée du maître et d’expliquer en quoi elle les touchait. CNNVanity Fair et Vogue nous en donnent un aperçu. On renvoie les non-anglophones à cette interview de Bernard Birsinger, photographe passé par la mission de la DATAR qui a suivi, à la fin des années 1960, les cours de Richard Avedon et en a retenu cet enseignement : « Il ne faut pas penser qu’il suffit de se placer à côté de l’optique d’une Deardorff pour pouvoir réaliser une œuvre qui marquera l’histoire de la photographie : je reviens toujours à cette phrase d’Avedon « faire simple, c’est ce qu’il y a de plus compliqué ».
 
PÂQUE AU BALCON
Avec la pandémie, les séries de confinement réalisées depuis la fenêtre sont devenues un genre à part entière. Le travail de Natalia Garcia se distingue de la masse par le fait qu’en 2020 elle était confinée chez ses parents, lesquels habitent dans un quartier juif orthodoxe de Mexico City : « Les synagogues étant fermées, les hommes juifs orthodoxes sortaient deux fois par jour sur les balcons pour prier. Pendant trois mois, mes journées ont été rythmées par les chants en hébreu. Un rythme que je trouvais réconfortant dans une période d’incertitude. »
 
SCULPTURES EN PIED
Au jeu du Schmilblick, la série « Brutalism » de Jojo Gronostay aurait dérouté plus d’un candidat, d’autant plus que les tirages géants et le titre entraînent sur une fausse piste. La nationalité allemande du photographe laisse à penser qu’on est en présence d’un héritier des Becher. Que nenni. Ces sculptures sont en fait des talons hauts, collectés sur le marché d’Accra et photographiés à l’aide d’un moyen-format. Mais au-delà du jeu et du trompe-l’œil, la série illustre la brutalité des échanges entre l’Afrique et l’Occident.
 
MAGAZINES À VENDRE
Certains contributeurs de Outdoor Photographer, magazine photo nature américain fondé en 1985, se plaignent de ne pas avoir été payés depuis plusieurs mois. Après l’arrêt de DPReview et Imaging Resource, un signe de plus de la mauvaise passe des médias photo anglophones.
 

RAPIDO…

• Près de cinq millions de Japonais sont atteints de démence. Par ses images évanescentes et ses tirages sur bandes de coton, Kazuhiko Matsumura capture l’essence de la maladie.
• La désinvolture avec laquelle certains galeristes occidentaux s’accaparent les artistes qu’elle a fait émerger révolte, à raison, Anahita Ghabaian.
• La maison la plus photographiée du Canada pourrait être détruite d’ici la fin de l’année.
• Bougeoirs, broderies, architectures d’intérieur… où s’arrêtera le revival du cyanotype ?
• Saurez-vous découvrir ce que cache la photo mystère #108 du Monde ? Si vous êtes Lausannois, vous avez un avantage.
• Saurez-vous repérer ce qui menace l’élan au premier plan ? Réponse ici.
• David Lynch aime les photos de William Eggleston… même les floues !
• On a retrouvé une scène coupée des Bronzés font du ski.
 
MUSIQUE
Merci à l’équipe de « Sans oser le demander » d’avoir mis sur notre route cette délicencieuse ritournelle.
Face B d’un 45 tours sorti en 1972. Pauline Carton au chant ; paroles et musique : Gustave Goublier et Jules Costé.
 
« Clique Clac », c’est chaque jeudi le résumé d’une semaine sur la Toile en dix entrées et quelques liens sélectionnés par la rédaction de Chasseur d’Images.