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D’aucuns présentent le Prix Niépce* comme le Goncourt de la photographie. L’analogie est plus pertinente que jamais cette année, Anne-Lise Broyer, la lauréate 2024, se plaisant à décrire son art comme « une expérience de la littérature par le regard ». Interrogée au printemps 2023 dans l’émission « L’art est la matière », elle racontait ainsi l’origine de ce double intérêt : « Quand j’étais petite, ma mère me disait : « Touche avec les yeux ». Ça, c’est une formule qui a été fondatrice. Je l’ai prise comme un double sens, le rapport sensible et sensoriel devait passer par le regard puisque l’on n’avait pas le droit de toucher. Donc, l’expérience du sensible allait passer par le regard. » Depuis 2001, Anne-Lise Broyer a produit seize livres dans lesquels se déploie son goût pour les fragilités humaines, les beautés antiques et les rugosités naturelles. Chez Anne-Lise Broyer, « l’œil accueille doucement les images avant de les laisser descendre dans la main », lit-on sur la page du Prix Niépce. Ce qu’a parfaitement su saisir David Bernet dans ce portrait vidéo de cinq minutes où l’on voit l’artiste manier le reflex, le tirage argentique et le crayon à mine graphite avec la même application.
À noter sur vos agendas : mercredi 19 juin, à 19h, l’auditorium de l’ADAGP accueillera l’Atelier Gens d’images consacré à Anne-Lise Broyer, lauréate du Prix Niépce. Cet événement sera en accès libre.
*Créé en 1955 par Albert Plécy, le Prix Niépce est décerné chaque année par l’association Les Gens d’images à un ou une photographe pro de moins de 50 ans.

RÉEXPÉDITION

Que faire des photos sur bâche une fois leur exposition terminée ? La Ville de Besançon a eu l’idée, a priori curieuse, de les recycler en tote-bags. Loin de s’en offusquer, l’auteur desdites images, Raphaël Helle, y voit le moyen de prolonger la mise en lumière des ouvriers et ouvrières qui sont au cœur de ses reportages. Les usines textiles ou métallurgiques où il s’est rendu lui ont ouvert leurs portes parce qu’il avait fait valoir son passé d’ouvrier. Le sésame est bien plus difficile à obtenir quand on veut pénétrer dans les entrepôts gigantesques où transitent colis ou denrées alimentaires. « J’ai commencé me consacrer à ce sujet en juin 2022, raconte la photojournaliste Sophie Loubaton, mais je n’ai pu faire mes premières images qu’en novembre ! La plupart des entreprises ne voulaient pas accueillir un photographe si ce n’était pas pour leur communication et dans leur intérêt. » Elle a bien fait d’insister : ses images permettent d’entrevoir la richesse humaine qui se cache derrière ses plateformes impersonnelles.

RÉAFFECTATION
En Amérique latine, certaines femmes portent le cheveu long, très long. Par coquetterie un peu, par superstition surtout. « Nos ancêtres, explique Irina Werning, croyaient que couper les cheveux, c’était couper la vie, que les cheveux sont la manifestation physique de nos pensées, de notre âme et de notre lien avec la terre. » Jacey Spencer a une vision plus utilitariste de sa longue chevelure, cette photographe de mariage plaçant régulièrement sa mèche devant son objectif pour créer un effet de flou artistique.

RECONVERSION

Certains chasseurs troquent leur fusil contre le téléobjectif. Mais la décision ne se fait pas du jour au lendemain, comme nous le raconte Alexandre Mondoloni dans un billet inspiré (et, on l’espère, inspirant) qui se conclut sur cette citation de Lamartine : « On n’a pas deux cœurs, un pour les animaux et un pour les humains. On a un cœur ou on n’en a pas. » Tous les chemins mènent à la photographie… et, inversement, la photographie mène à tout. Spécialisée dans la prise de vue culinaire, Mathilde de l’Écotais a tapé dans l’œil de Thierry Marx qui lui a confié le design et l’aménagement d’un de ses restaurants : «  Mon travail de photographe consiste à dessiner avec la lumière. Et c’est la même chose pour les lieux, quelle que soit l’échelle. »

RESPIRATION

Depuis son lancement en 2007, la Fête de la Nature ne cesse de grandir. L’édition 2024, qui se tient du 22 au 26 mai, propose un programme de près de 10000 animations gratuites sur plus de 2200 lieux partout en France. Parmi ces animations, de nombreuses ont trait à la photographie, qu’il s’agisse d’initiations à la prise vue animalière (à Gambsheim ou Issy-les-Moulineaux, par exemple), de balades accompagnées (du Pinail au lac du Der en passant par la Guyane) ou encore d’expositions naturalistes (« Les ailes de Provence » à Mas-Thibert, « Rencontres en eau douce » à Nances, « Petite nature » à Donzy,  « Entomonde » à Sommières, etc.). Où que vous soyez, il se passe quelque chose.  Et il y en a pour tous les goûts. Par exemple, si vous avez apprécié le portfolio de Tanguy Stoecklé dans notre dernier numéro et que vous êtes du côté des Pyrénées-Orientales, rendez-vous à Nyer, où la Maison de la Réserve présente une exposition sur le monde renversant des chauves-souris, avec observations possibles en caméra infrarouge.
Pour en savoir plus sur la genèse et le fonctionnement de la Fête de la Nature, on vous renvoie à la longue interview de Fabien Chenel, directeur de l’association, publiée dans le n°79 de Nat’Images (disponible aussi en édition numérique).

flashback : le vintage à l'honneur

Une nouvelle édition d’Images à la sauvette sortira le 1er juin,
et les précommandes sont ouvertes
(avec quelques goodies
à la clé).

BeauxArts et
Invitation au voyage
mettent à l’honneur
Mey Rahola,
photographe espagnole disparue en 1959
dont on redécouvre l’œuvre, longtemps dispersée, seulement aujourd’hui.

L’Équipe rend hommage
à l’un de ses anciens photographes :
Alain Landrain
.

Où est le beau ?
se demande
Hélène Aguilar
dans son podcast.
Dans le Polaroid,
bien sûr !

De passage sur TV5 Monde, Olivier Sultan a parlé d’une expo de la galerie Art-Z sur le studio photo en Afrique de l’ouest. L’occasion de (re) voir
une interview d’archive
de Seydou Keita.

Il y a 47 ans, les arènes
de Mont-de-Marsan accueillaient la deuxième édition de son festival punk. Sud Ouest a ressorti quelques images d’archives.

Comment les photos étaient-elles transmises aux journaux en 1937 ?

Entre autres curiosités, Henri, la plateforme vidéo de la Cinémathèque, héberge Stop laughing,
this is England
,
un documentaire diffusé en 1963 sur la chaîne britannique ITV/ABC, composé uniquement de photos de HCB, soutenues par un commentaire pince-sans rire sur les mœurs anglaises.

De tout temps, photographier la faune sauvage présente
des risques,
n’est-ce pas Dingo ?

Connue pour ses photos d’architecture, Berenice Abbott a aussi œuvré dans l’illustration de manuels de sciences physiques.

Avis aux amateurs de belles pièces vintage et de procédés historiques, le n°11 de The Classic vient de sortir. Et, comme d’habitude, la revue est en téléchargement libre.

En trois épisodes rondement menés et
(sur le daguerréotype,
la stéréoscopie et le procédé négatif/positif), le Musée Carnavalet fait
le tour en moins de douze minutes des origines
de la photographie.

les petites Musiques de fin

Jusqu’au 31 décembre, le Musée Albert-Kahn de Boulogne-Billancourt met en lumière la passion du banquier philanthrope pour le végétal à travers les milliers d’images autochromes réalisées dans ses jardins de Boulogne et du Cap-Martin. Pour l’occasion, les auditeurs et auditrices d’Allegretto (France Musique) sont invités à participer à la programmation de l’émission du vendredi 24 mai en suggérant un morceau de musique inspiré de la photo Prunus à fleurs roses dans le village japonais. Nous, on hésite entre le jazzy « Albert Kahn » de Girls in Airports et l’aérien « Autochromes » de Robin Guthrie (oui, oui, le Robin Guthrie des Cocteau Twins).

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