Un si bel enchanteur

Démarré par GROSBEC, Février 26, 2012, 14:11:28

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GROSBEC

Bonjour à vous tous,

Au printemps dernier, j'ai eu la chance insigne de suivre une colonie depuis son arrivée jusqu'à l'envol des jeunes.
Trois mois de bonheur, trois mois d'émerveillements.
Je vous en propose quelques souvenirs.

Amitiés,

Patrick

Majestueux, fascinant, il est de ces oiseaux dont on rêve tout l'hiver. Il est loin, alors, sur ses terres africaines. On l'attend en repassant les souvenirs du printemps et de l'été. Dès l'arrivée du printemps, l'impatience l'emporte, la fièvre monte...
Merops apiaster...
Bien sûr vous savez tous quel magnifique oiseau se dissimule derrière ces deux mots, l'un grec, l'autre latin.
Merops pour le grec, apiaster pour le latin.
Notre oiseau appartient à ceux dont le nom est issu, soit de leur chant, soit de leur nourriture.
Aristote avait retenu apiaster, comme celui qui mange des abeilles ; cette appellation était formée sur le nom latin « apis » qui, comme chacun le sait, a généré abeille, puis apiculteur.
Sage était Aristote.
Mais, au fil des siècles, les italiens le nommèrent « vespiere »  issu de « vespa », non un petit scooter, mais bel et bien une guêpe.
Nos amis britanniques l'ont appelé « bee-eater »...

1 - Ils sont là !


2 - Ils se parlent


3 - Ils prennent des bains de soleil


« Eater » veut dire, en anglais, mangeur, mais « bee » ? Abeille !
Alors ? Mangeur d'abeilles ou bien mangeur de guêpes ?
Ici prend place la longue opposition entre ces deux savants admirables que furent Linné, le suédois, et Buffon, le français.
Buffon commentait toujours abondamment l'origine des mots, et il fut de grande ressource pour l'étymologie.
Linné était un grand, mais un strict scientifique, qui est resté muet sur l'origine des noms qu'il a choisis.
La notoriété les opposait en ce XVIIIème siècle qui voyait la langue française dominer en Europe.
Carl Von Linné, du reste, avait interdit à ses filles d'apprendre le français.
Buffon était un conteur. Linné un classificateur.
Inclinons nous devant ces deux immenses talents.
Mais force restera, pour cette fois, à Buffon, puisque nous sommes en France.
Il disait « Cet oiseau mange non seulement des guêpes qui lui ont donné son nom français, et les abeilles qui lui ont donné son nom latin, anglais etc..., mais il mange aussi les bourdons, les cigales, les cousins, les mouches, et autres insectes qu'il attrape en volant »
En nommant Merops apiaster, notre Guêpier d'Europe Linné a rejoint les thèses d'Aristote qui nous a quitté 322 ans avant l'ère chrétienne.

4 - C'est le temps des offrandes


5 - Attirer l'attention...


6 - Premiers accouplements

Cheps

Nous ne sommes pas encore sortie de la grisaille que tu nous mets de la couleur...jaime bien. En allemand c'est aussi  mangeur d'abeille la ou j'ai eu l'occasion de les phtographier

urka

Déjà marre de l'hiver?
Ces photos sont superbes et l'on a envie de Printemps!
André.

Jacques61

Je retrouve ici avec bonheur tes protégés , un + pour la scène d'accouplement ! ;)
cordialement Jacques

Roland Ripoll

Un peu de nostalgie, mon cher Patrick ? Rassure toi, c'est une nostalgie  des beaux jours et de ce merveilleux oiseau que je partage et que j'éprouve aussi parfois. Mérops me manque, comme peut manquer un être cher auquel on est très attaché.
Les autres ne le savent peut être pas mais ces très belles images ont une autre valeur que photographique: elles témoignent non seulement de la splendeur du guêpier mais aussi, pour qui connaît l'histoire, de sa fragilité et de son besoin de protection...
Etre simple pour être vrai

Cheps

Citation de: Roland RIPOLL le Février 26, 2012, 17:00:36

Les autres ne le savent peut être pas mais ces très belles images ont une autre valeur que photographique: elles témoignent non seulement de la splendeur du guêpier mais aussi, pour qui connaît l'histoire, de sa fragilité et de son besoin de protection...
Si si nous connaissons sa fragilite car rare et  tres localise dans notre region et encore pas cote francais ou la seule nidification connue fut malheureusement mise en echeque par...un photographe. Donc oui participons a proteger ce bijou aile.

amateur85

une série qui commence très fort, vous en avez de la chance de pouvoir contempler de si beaux oiseaux, respect
5 photos par jour sur mon blog

Pat.Jack

Superbe début d'une belle histoire...

On veut la suite !!!  ;)
PatJack

roberiton

Magnifique début de série  :o ::) Superbe oiseau, bravo !

Amicalement

Henri
Passionné avant tout...

Clic-Clac 51

Une belle rencontre
Merci d'avoir partagé avec nous ces superbes images
Amicalement Denis ;)

GROSBEC

Merci, vraiment merci à vous tous.

Cette histoire, me tient vraiment à coeur.
Ce sera une longue histoire, si vous le voulez-bien, car elle traduit 3 mois de bonheur et puis une fin si triste et si banalement tragique que je préfère la différer pour ne penser d'abord qu'à ce qui est admirable.

Amitiés,

Patrick

Des abeilles et des guêpes mais  encore ? Strictement insectivore, le guêpier peut manger jusqu'à 250 abeilles par jour...
Son menu comporte de nombreux hyménoptères comme l'abeille ou la guêpe, les bourdons,
les frelons.
Pour compléter ce plat de résistance, viennent les papillons, et les libellules.
Les coléoptères, bien représentés par les cétoines et les hannetons, viennent varier l'ordinaire. Au moment du dessert, peut-être quelques diptères (la famille des mouches et des taons) ou bien une verte sauterelle. Parfois, dans le sud, une cigale, l'insecte le plus bruyant de la planète.
Merops appartient à la grande famille des Méropidés.
Vingt-quatre espèces connues dans le Monde.
Cette belle famille fait partie de l'ordre des coraciiformes. Celui des Rolliers, celle des Martin-pêcheurs. Celui des beaux plumages, des oiseaux colorés.
Que dire du plumage de Merops ? Il conjugue à merveille les roux châtaigne, les jaunes d'or, le noir, le blanc, les verts...et aussi les bleus, les bleus turquoise.
Comble de l'élégance, son iris rouge carmin vient rehausser encore sa beauté.
Les deux rectrices médianes, les filets, dépassent les autres de 2 cm environ.
Le guêpier ne peut être confondu avec nul autre oiseau. On lit souvent qu'il est de la taille d'un merle. Il est vrai que le merle mesure 24 centimètres, pour 27 chez Merops. Mais c'est insuffisant pour rendre compte de la différence de stature ; le guêpier est beaucoup plus élancé, longiligne serait-on tenté de dire. Il est svelte, avec un poids moyen de 55 grammes (de 48 à 78 g pour le mâle et de 44 à 72 g pour la femelle). A comparer aux 100 grammes de notre merle noir dont on ne saurait dire, pourtant, qu'il est enrobé.


7- Un moment de tendresse...


8 - Tendre ? La preuve !


9 - Chasseur d'Afrique


Le dimorphisme sexuel est discret, infime, même.
Sans doute le plumage de Monsieur est-il un peu plus éclatant, comme souvent, mais il s'agit  là de nuances plutôt subtiles.
On peut reconnaître Madame à ses scapulaires un peu plus verdâtres, moins dorées, et aussi à ses couvertures alaires où le vert est plus abondant ; l'aile semble ainsi moins rousse.
Leurs enfants, par contre, sont très aisément reconnaissables à leurs teintes plus douces, parmi lesquelles dominent, sur la calotte et le manteau, le roux et le vert.
Chez eux, les rectrices médianes ne sont pas encore effilées, et l'iris est noir. Non content de ce festival de couleurs, le guêpier se fait remarquer par son chant, ses appels roulés et liquides, si difficiles à transcrire. Inoubliables aussi, envoutants même.
Très souvent c'est ce chant qui permet de l'identifier, alors même qu'il est encore hors de vue, chassant très haut dans l'azur ou perché au sommet d'un grand arbre ; lorsque le nombre des oiseaux augmente, aux abords d'une colonie, par exemple, le concert devient grandiose. Bien des nuances peuvent être observées : cris de contact, cri d'alerte, appel des enfants ou du conjoint qui couve.


10 - On se parle beaucoup


11 - Sans oublier la chasse


12 - Ni la vigilance

softborn

Ce n'est pas juste ... Alors que la nature est grise partout, nous sortir de telles photos pour nous faire rêver  ;)

Mais toutes ces couleurs font du bien au moral, merci pour cet avant gout du printemps.

Amicalement.

JP;.
Amicalement.

JP.

agromi77

superbe travail et observation bravo
A77SONY

Roland Ripoll

Je connais ces images et pourtant elles m'émerveillent toujours autant ! Puisses-tu Patrick nous en faire d'aussi belles en 2012 !
Etre simple pour être vrai

photographe33

Une magnifique série d'un très bel oiseau rare ! Et privilège rare donc, d'avoir pu le suivre 3 mois (!!!!) avec une telle proximité

amicalement
jean claude
Amicalement, Jean claude

lil95

Superbe série !!! 
Amicalement.
Liliane

objectif-images

Magnifique série haute en couleur! Bravo

Joebart

Bravo!!! quelles images... à couper le soufle

urka

Les photos de cette 2è série sont resplendissantes, merveilleuses!
Bien sûr, on attend la suite ;).
André.

GROSBEC

Bonjour à vous tous,

Je suis très heureux que cette histoire vous plaise. Elle évoque pour moi 3 mois (mai, juin et juillet) passés au paradis.
Très proche des oiseaux qui avaient accepté ma présence (très discrète).
Un grand privilège et de merveilleux souvenirs.
Merci pour vos commentaires si sympathiques.
Voici la suite...

Amitiés,

Patrick

D'origine asiatique, le Guêpier d’Europe a conquis, au cours des âges, la plupart des forêts et savanes tropicales, à l'exception de celles du continent américain. Supportant mal le froid, c'est en Afrique qu'il passe l'hiver. D'où ce surnom qui associe ses quartiers d'hiver à cette habileté qu'il montre à capturer ses proies en vol. D'aucuns se posent la question de savoir s'il s'agit d'un oiseau d'Europe qui va passer l'hiver en Afrique ou plutôt d'une espèce africaine qui vient se reproduire en Europe. La thèse dominante fait de lui un oiseau africain et il faut reconnaître que son histoire va dans ce sens. Qu'importe, finalement ? Merops est un grand migrateur. On dit que ceux qui naissent en France, en Europe occidentale, vont, les noces accomplies, gagner l'Afrique de l'ouest, du Sénégal au Ghana.
Les familles issues du centre ou de l'est de l'Europe, iraient quant à elles, plutôt rejoindre l'Afrique de l'est, et même l'Afrique du sud.
Bientôt ceux-là retrouveraient le Kenya, l'Ouganda, les rives du lac Victoria ; pour certains le Transvaal, aux portes de Pretoria.

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Ce bel oiseau traverse les océans et les déserts, dont le terrible Sahara, et franchit l'Equateur ; c'est un chemin semé d'embûches au cours duquel les étapes sont parfois rares. En France, il trouve des auberges accueillantes, dans la moitié sud du pays, dans le Languedoc, la Provence, le Vaucluse, et la Corse.
Mais aussi dans le Centre, les vallées de la Saône et du Doubs, jusqu'en Touraine.
Etapes plus surprenantes, peut-être, la Région Parisienne, et spécialement la Seine et Marne.
Certaines familles s'installent dans le Finistère Sud, la Dordogne, la Gironde ou la Vendée.
Environ 10 000 couples se reproduisent chez nous pour une population reproductrice estimée, en Europe, dans une fourchette allant de 480 000 à 1 000 000.
Ils affectionnent les paysages variés, présentant une alternance de pâtures, de cultures et de fiches, modérément entrecoupées d'arbres ou de bosquets.

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Mais la présence de l'eau est tout aussi vitale, non seulement pour le bain, mais aussi parce qu'elle favorise l'abondance des insectes.
Elle n'est pas suffisante ! Encore faut-il des endroits propices à la construction des nids.
Les hauts bords sablonneux des rivières, comme l'Ariège, mais aussi des falaises naturelles, des carrières, des excavations de canaux ou de fossés.
Parfois, les terriers sont creusés au niveau du sol.

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Pat.Jack

De très belles maj depuis mon dernier passage.

J'attends la suite avec impatience..
PatJack

Atriplex

Une série très intéressante, avec de bien belles photos! Merci d'avoir partagé les fruits de ta persévérance.
Cordialement,
Martine & Gérard
Gérard

GROSBEC

Merci à vous tous,

Evoquons à présent le petit calendrier de la vie.

Amitiés,

Patrick

Merops est un oiseau grégaire. En couple, ou bien encore célibataire, il vole en groupe le jour et rejoint ses congénères pour passer la nuit dans ses dortoirs qui rassemblent souvent plusieurs dizaines d'oiseaux.
Les guêpiers s'organisent en sociétés complexes. La famille comprend le couple, assisté, parfois d'un aide, le fameux assistant, souvent un jeune mâle qui contribuera à la construction du nid et à l'élevage des petits.
Plusieurs familles constituent un clan dont les membres restent en contact continuel par la voix.
Plusieurs clans forment une colonie. La solidarité y règne et les guêpiers qui lui appartiennent recherchent les contacts et s'alertent mutuellement en cas de danger.
Il arrive qu'un couple niche en solitaire, mais ce n'est pas fréquent.
Merops niche en colonies, de 20 à 30 oiseaux, généralement, en France ; il ne défend pas de territoire, à proprement parler. Le seul territoire de la famille est le perchoir. Pendant la période de reproduction, il sert tout à la fois de poste de guet, de lieu de parades et de toilettage.


19 - Rêves d'amour


20 - Offrande


Ce perchoir est âprement défendu contre tout intrus ; qui n'est pas membre du clan y est accueilli à coups de bec. Même les jeunes ne sont pas épargnés.
Arrivant, déjà appariés, sur les sites fin avril ou dans les premiers jours de mai, les oiseaux prennent une petite semaine pour s'installer et choisir leurs perchoirs.
Aussitôt commence le creusement ou la restauration des terriers qui va les occuper pendant 10 à 20 jours. C'est en effet une lourde tâche. Prenant son élan, le bec pointé vers le sable l'oiseau pique vigoureusement le sable.
Fermement appuyé sur ses rectrices, il creuse avec le bec, aussi longtemps que des racines ou une pierre ne le dissuadent pas. Ainsi s'explique la présence d'ébauches de terriers abandonnées en raison d'obstacles trop importants.
Les deux conjoints se relaient sans relâche, et il n'est pas superflu d'être deux pour creuser cette grande galerie, et l'achever par une belle chambre d'amour ! 10 à 12 kilos de déblais qui sont évacués par des pédalages activant ses courtes pattes. Le terrier se termine par une chambre ovale aux dimensions variables ; lorsqu'elle est assez confortable, elle permet aux parents nourriciers de faire demi-tour et de sortir du nid « en obus ». Les architectes les moins courageux devront passer la marche arrière.
Quelques jours plus tard, les parades commencent. On assiste aux offrandes et aux premiers accouplements, au sol ou sur l'un des perchoirs.


21 - Première récompense


22 - Union sur le perchoir


Vers la fin mai, les œufs (de 3 à 6) blancs sont pondus à 24 ou 48 heures d'intervalle et l'incubation débute dès le premier œuf.
Elle va durer 21 jours au cours desquels les oiseaux seront beaucoup moins visibles.
Monsieur et Madame se relayant à des intervalles qui peuvent descendre jusqu'au quart d'heure, c'est un peu comme si l'effectif était divisé par deux. Fort occupés par cette tâche essentielle, ils ne trainent pas sur les perchoirs !
Un peu avant la mi-juin, les premiers oisillons éclosent. Ils vont faire un séjour de 28 jours au nid.
A ce moment, les parents redoublent d'activité ; le temps du nourrissage est arrivé.
Passées trois semaines, les premières bousculades interviennent entre de jeunes gaillards qui guettent leurs parents à la sortie du terrier. Les parents n'entrent plus, alors, dans la galerie et se posent devant l'ouverture, donnant la becquée aux jeunes qui se pressent à la fenêtre.


23 - Turbulant

Michel Didier

Superbe reportage, qui me fait remonter plein de bons souvenirs du printemps dernier. Bravo Patrick !

Cdt
Michel
Le sot sait, le sage cherche.

JC34


GROSBEC

#25
Correction d'une fausse manoeuvre...pour remettre en place les images 19 à 23.
C'est promis je ne le ferai plus :-[

19 - Rêves d'amour


20 - Offrande


21 - Première récompense


22 - Union sur le perchoir


23 - Turbulant

Roland Ripoll

Cette dernière image Patrick est celle qui, parmi toutes de cette belle série,  me touche le plus parce que malheureusement je connais la suite... et que je m'inquiète de savoir si ce jeune, devenu adulte entre temps, trouvera lui aussi au printemps un autre lieu où vivre, où aimer et se où reproduire...
Etre simple pour être vrai

raby

La 20 et la 22 super serie trés beau piqué bravo

Michel Didier

Citation de: GROSBEC le Mars 08, 2012, 14:08:29
Correction d'une fausse manoeuvre...pour remettre en place les images 19 à 23.
C'est promis je ne le ferai plus :-[
Mais apparemment, en corrigeant la fausse manœuvre, tu as dû faire une fausse manœuvre, et les 1ères ne s'affichent plus :-\ ... Mais celles qui s'affichent sont très sympa.

Cdt
Michel
Le sot sait, le sage cherche.

GROSBEC

Merci Michel,

Hélas non, pas de double fausse manoeuvre. Ma bêtise d'origine (corrigée pour les images 19 à 23) a fait disparaître aussi les images de 1 à 19....
Non rectifié... Mais si certains souhaitaient les revoir, il est certain que je ferai le nécessaire.
On a le droit de se tromper. Mais il faut l'assumer.
Et ne jamais recommencer. Là, c'est promis.

Amitiés,

Patrick

GROSBEC

Bonjour à vous tous,

Les petits grandissent et le nourrissage bat son plein.
Petite suite.

Amitiés,

Patrick

Un peu avant la mi-juillet les plus précoces font leur premières sorties, encore un peu maladroits et instables sur les branches. Pour le naturaliste, il est émouvant d'assister à ces premiers envols après avoir suivi la vie de la colonie. Tout fiers, les juvéniles ne tardent pas à joindre leur voix à la chorale. Ils reviennent passer la nuit au nid.
Les promenades en famille conduisent les oiseaux de plus en plus loin du nid ; il faudra encore trois semaines aux parents pour faire de leurs jeunes des guêpiers accomplis. Le nourrissage se poursuit hors du nid ; mais les parents se montrent vite inflexibles et refusent bientôt la becquée, car il est temps pour les jeunes d'apprendre à chasser. Dès le 15 août, les familles se regroupent et reprennent le chemin de Gibraltar.


24 - Une glissade


25 - Nourricier


26 - Encore instable sur la branche


La vie de Merops est parsemée d'embûches.
Outre les fatigues dues à l'effort migratoire, les variations climatiques peuvent rendre rares les insectes, bien que notre ami, et ses petits puissent supporter une disette momentanée.
Il connaît des prédateurs tels que l'épervier ou le faucon d'Eléonore.
L'érosion naturelle peut faire disparaître certains de ses habitats, et la croissance de la végétation sur ses falaises le conduit à abandonner ses terriers.
Mais tout ceci n'est rien face à l'action de l'homme.
Lui fait disparaître ses colonies en défigurant l'endroit par des décharges sauvages. Très souvent, la poursuite de l'exploitation dans les carrières de sable produit les mêmes résultats.
Il s'agit pourtant d'une espèce protégée dont la destruction des nids est interdite et sanctionnée pénalement.
L'utilisation excessive des pesticides le prive aussi de nourriture.
Triste palmarès !
Mais ça n'est pas tout, encore.


27 - Plus assuré


28 - Assez fier de sa sortie


A Chypre de 3000 à 5000 guêpiers sont tués, chaque année, pour être mangés ; c'est la même chose à Malte ou dans le delta du Nil.
L'apiculteur lui voue une haine farouche ! Tel le pisciculteur qui piège le martin-pêcheur, l'éleveur d'abeilles ne peut tolérer un...mangeur d'abeilles.
En Espagne, au Maroc ou en Grèce, il est pourchassé.
Tué au fusil, ou bien piégé avec des cannes à pêche appâtées avec des abeilles vivantes.
Le poison est fréquemment utilisé : strychnine ou cyanure, d'autres produits encore sans préférence marquée pourvu qu'ils tuent.
Comment ne pas être révolté ?
C'est indigne, et, au surplus, stupide.
Aristote avait été l'un des premiers à démontrer l'étroitesse des liens unissant les populations de guêpiers aux populations d'abeilles.
L'Afrique possède des millions de ruches traditionnelles et abrite les deux tiers des abeilles du monde ; elle attire aussi les deux tiers de la population mondiale de guêpiers.
Mais, car il y a un mais de taille !
Dès 1936, au Kazakhstan, devant l'ampleur des prélèvements, une équipe de chercheurs fut chargée d'étudier l'impact réel du prélèvement exercé par les guêpiers.
Résultats de l'enquête : le guêpier mange surtout de vieilles abeilles ou les individus malades, tout en consommant de multiples autres insectes prédateurs de l'abeille.
Ce faisant, le guêpier limite la propagation des maladies et assure plutôt la sécurité de la ruche.
Les chercheurs ont conclu qu'il fallait reconsidérer les points de vue et protéger le guêpier.
Alors, Messieurs, de grâce ! Remisez vos fusils, rangez vos pièges et oubliez le poison.


29 - En colère Merops

urka

Une suite merveilleuse par les images et enrichissante par les textes!
Merci pour tout ce que tu as apporté!
André.

Roland Ripoll

Je redoute la suite que je connais pourtant.... Les dernières images, 27, 28 et 29 sont superbes Patrick !
Etre simple pour être vrai

Cheps


GROSBEC

Merci à vous !

Pour cette suite, je voudrais, après cette présentation de l'oiseau, vous parler de l'endroit.
Hélàs, la fin de l'histoire pourrait s'appeler "Souvenirs d'un paradis perdu". Mais avant d'aborder un bien triste épilogue, restons aux jolis souvenirs.

Amitiés,

Patrick

Une nuit...J'ai fait un rêve. J'ai rêvé d'un lieu sauvage, garni de saules, d'aulnes et de chênes. L'aube naissante dissipait les brumes de la fin de nuit ; il faisait beau. Les chicorées sauvages décoraient le sol de leurs beaux pétales bleus. Une petite mare enrichissait encore l'endroit. Une grande libellule se reposait en haut d'une graminée. La Cistude d'Europe se prélassait au soleil, bien assise sur une souche. Aucun bruit alentour, si ce n'est le doux murmure des feuilles caressées par une brise légère. Aucun bruit, mais des chants. Le sifflement du Loriot, les trilles du Rossignol qui accompagnaient de belle manière la chorale des guêpiers. Les oiseaux étaient proches, familiers, même. Leurs plumages multicolores. Un martin-pêcheur à l'affût  visait le ciel du bec en regardant passer ses cousins si loquaces...Au réveil je compris que ce rêve s'était réalisé. Il était l'évocation des heures passées dans cet endroit paradisiaque. Une visite onirique de merveilleux souvenirs. Honneur à mon ami le Guêpier grâce auquel j'ai découvert ce lieu en 2010. Cette année-là une trentaine de nids étaient occupés sur un terrain limitrophe. C'était, pour moi la découverte. Les trop rares moments (je n'étais parvenu jusqu'à lui qu'à la fin juillet) passés alors en sa compagnie m'avaient émerveillé et suscité un profond désir de le rencontrer au printemps prochain. Neuf mois de rêves colorés, de préparation, de recherches. Dès avril, je me rendis sur place, sachant qu'il était bien trop tôt, mais avec le but de reprendre contact avec le terrain et de tromper mon impatience. Quelles ne furent pas mon indignation et ma révolte quand je découvris que sa belle falaise était totalement enfouie sous une montagne de gravats, de planches, de résidus de toute sorte. Découragement ... Mais persévérance tout de même. J'explorai fébrilement tous les environs et découvris un endroit très proche qui m'a paru présenter tous les critères pour qu'il veuille bien s'y installer : grands arbres, texture du sable, présence de l'eau...

30 - Un bien joli Monsieur


31 - Attendrissant Merops


32- Curieux


Aux premiers jours de mai, je partis, le cœur battant pour une première visite de repérage. Peu après avoir quitté ma voiture, je l'entendis. Il était là ! Il avait bien voulu ! Pendant une bonne heure, j'assistai à ses vols qui le conduisirent souvent très près de moi, seulement agenouillé et restant totalement immobile. Les Ohhh ! furent suivis de Ahhh ! Quelle beauté, quelle élégance. Quel bonheur de le revoir et d'entendre son chant. Ainsi débuta une période de trois mois pendant laquelle mon rêve avait pris vie. Bien souvent je suis allé le voir, par beau temps, et parfois sous la pluie, partant le plus souvent à l'aube pour parcourir la petite centaine de kilomètres qui me séparait de lui. De l'installation jusqu'à l'envol des jeunes, j'ai pu, me faisant tout petit, assister à un fabuleux spectacle.

33 - Sous une brise légère


34 - Amateur de bourdons


35 - Une Dame aux couvertures teintées de vert

GROSBEC

Bonjour à vous tous,

Un peu lassés du guêpier ?
Voici une petite suite qui met en scène un autre oiseau coloré.

Amitiés,

Patrick

Lors de ma première visite, j'avais cru apercevoir un éclair bleu. Serait-ce lui ? Au fond, j'en étais presque certain. Cette petite mare bien tranquille ne pouvait que le séduire. Et puis, entre les ronciers, une falaise de terre semblait destinée à accueillir son nid. Quand je vous parlais de paradis...Attentif à Merops que j'observais, un matin, je glissai un regard par l'ouverture arrière de ma tente ; je le vis. Il était là, à 3 mètres, à l'affût sur une branche ! Je lui tournais le dos : un comble. De plus, le matin, il était en plein contre-jour. Mais, lors de visites ultérieures, je l'observais souvent. Je pus identifier son perchoir favori. Comment résister ? Rendez-vous fut pris pour une fin de journée. A ce moment-là, la lumière serait propice et, avec un peu de chance, Martin viendrait pêcher. Profitant de l'accalmie de juin, je décidais un jour, de partager ma séance d'affût en deux sessions : début d'après-midi consacrée aux guêpiers, et puis, vers 17 heures, un petit déplacement vers le poste de chasse de Martin. Il s'était absenté. Rien ne m'interdisait donc de placer rapidement ce nouvel l'affût. Ce fut vite chose faite. Une demie heure de patience...Le doute qui peu à peu s'installe...Allons, Martin, sois gentil, viens me voir ! Soudain, l'apparition ! Il avait dû m'entendre. Le voici à moins de 4 mètres, tranquille, scrutant l'onde. Quelques palpitations, bien sûr...Bien net dans le viseur, il était immobile. Le premier déclenchement le fit un peu sursauter.

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Qu'est-donc, semblait-il se dire ? Bien vite, il reprit son guet. Les autres déclenchements le laissèrent indifférent ; il s'accommodait de cette présence à peine soupçonnée ; acceptée, peut-être. Un premier plongeon infructueux. Nullement découragé, il reprit son poste. Passage des guêpiers...Pointant le bec vers le ciel, il les écoutait. Etait-il indigné par ce joli tapage ? Non, certainement, car il se remit vite en pêche. Avec succès, cette fois. De retour sur sa branche, il avait dans le bec un petit poisson frétillant. Bien vite, il l'estourbit, le retourna et l'avala sans façons. A plusieurs reprises, je renouvelai l'expérience, avec d'autant plus d'empressement que le niveau d'eau baissait bien vite. Lors d'un autre affût, il me fit attendre après une première visite. Mais que fais-tu donc, Martin ? Scrutant la mare par une ouverture latérale, je découvris mon ami à l'affût à moins de 2 mètres de moi sur une petite branche basse, malheureusement masquée par les herbes. Mais un peu plus tard, il opta de nouveau pour sa branche favorite, et m'offrit quelques nouveaux portraits. Je mesure la chance que j'ai eue de passer quelques heures de complicité avec lui. Bien sûr, j'avais rêvé de voir apparaître les enfants de sa seconde nichée ; rêve d'images...Trois enfants alignés, côte à côte sur la branche... La chaleur et la sécheresse de ce début d'été en ont décidé autrement. Je l'avais vu, souvent, bien des années plus tôt ; je l'ai revu, depuis, en d'autres endroits. Nous nous reverrons, un jour ou l'autre, j'y tiens beaucoup. Le rideau se baisse sur toi, Martin, pour ce soir. Avant de parler de tes voisins, de la richesse d'un milieu qui t'a plu, à toi aussi, je te remercie du fond du cœur, bien sûr pour ta confiance, plus encore pour ton existence et ta beauté.

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photographe33

Belle histoire, belles photos pour nous et beaux moments pour le photographe (les posts permettent juste d'essayer de revivre un peu ces beaux moments !)

amicalement
jean claude
Amicalement, Jean claude