Règle empirique pour déterminer le cadrage théorique en fonction de la distance

Démarré par Tonton-Bruno, Janvier 14, 2018, 10:13:48

« précédent - suivant »

Tonton-Bruno

Bonjour.

J'avais lu et vérifié par ma propre expérience que si les reporters des années 60-70 aimaient tant les objectifs de focale 35mm en format 24*36, c'est qu'il existe une règle empirique très simple pour connaître le champ cadré par cet objectif avant même de viser le sujet:

Si le sujet se trouve à 6m, on va cadrer une scène de 6m de large.
Si le sujet se trouve à 4 ou 9m, on cadrera 4 ou 9m de large.

Si le sujet est à 3,60m on cadrera une scène de 3,60m de large, et cette distance correspond à 100 fois la focale.

Ceci m'amène à une autre règle empirique valable semble-t-il pour toutes les focales:

Lorsque la distance de MaP est égale à 100 fois la focale, mon cadrage fait 100 fois la largeur du capteur, soit 3,60m en format 24*36.

C'est une règle qui ne fonctionne que si on est au moins à 50 fois la distance focale, car pour les mises au point plus rapprochées, la focale réelle des objectifs change parfois grandement.

A partir de là j'ai quelques questions:

- Peut-on expliquer simplement la règle distance de MaP = largeur du cadrage pour le 35mm ?

- Peut-on expliquer simplement la règle n fois la distance focale = n fois la largeur du capteur pour l'image cadrée ?

- Est-ce que cela permet de déterminer à 5 ou 10% près la focale réelle d'un objectif à sa distance minimale de mise au point ?

Pour la première question je me suis fait quelques schémas très empiriques, mais mes connaissances en optique géométrique sont bien trop limitées pour que je puisse leur accorder quelque crédit.

jac70

C'est un bête problème de géometrie (triangles semblables)

Effectivement, avec un objectif de 35mm et un sujet à 9m sur un capteur 24x36

TS = (TC x D) / F = 36mm x 9m /35mm = 9m à un chouia près

Cela répond à tes 2 premières questions...

Pour la 3ème, c'est beaucoup plus complexe, car cela dépend de la formule de l'objectif, je suppose....

Tonton-Bruno

Citation de: jac70 le Janvier 14, 2018, 10:24:44
C'est un bête problème de géometrie (triangles semblables)

Effectivement, avec un objectif de 35mm et un sujet à 9m sur un capteur 24x36

TS = (TC x D) / F = 36mm x 9m /35mm = 9m à un chouia près
Oui, c'est le calcul que j'ai fait moi aussi à mon modeste niveau, mais je crains, peut-être à tort, que les choses ne soient un peu plus compliquées.

seba

Citation de: Tonton-Bruno le Janvier 14, 2018, 10:29:03
Oui, c'est le calcul que j'ai fait moi aussi à mon modeste niveau, mais je crains, peut-être à tort, que les choses ne soient un peu plus compliquées.

Non c'est bon.

Tonton-Bruno

Ah bon, merci.
Je m'enhardis jusqu'à publier le schéma que j'avais posté il y a quelques années, mais qui me paraissait trop rudimentaire.

seba

Par contre pour les distances proches, le tirage augmente beaucoup par rapport à la distance de mise au point et on peut appliquer les formules classiquement utilisées en macro (permettent de calculer tirage t, distance frontale d, rapport de reproduction).
Sur ce schéma, on voit qu'il faut aussi tenir compte de l'interstice.

jac70

Ton schéma est bien le même que le mien, Tonton, sauf que tu comptes la distance depuis le capteur, ce qui est plus rigoureux même si cela ne joue pas beaucoup !

C'est le schéma que je ressort à chaque fois que quelqu'un s'imagine qu'avec un 300mm il va pouvoir avoir un moineau plein cadre à 100m....
Déception assurée !

;D ;D ;D

seba

Citation de: Tonton-Bruno le Janvier 14, 2018, 10:33:42
Ah bon, merci.
Je m'enhardis jusqu'à publier le schéma que j'avais posté il y a quelques années, mais qui me paraissait trop rudimentaire.

Selon le schéma de jac70, la distance de mise au point est la distance objectif-sujet, la relation entre les triangles semblables est respectée, mais on néglige l'augmentation de tirage.
Sur ton schéma, la distance de mise au point est la distance capteur-sujet, qui pour une distance lointaine n'est pas très différent de la distance objectif-sujet.
En appliquant les formules macro, le calcul est plus précis (inutilement précis), jusqu'à une distance où on ne peut plus négliger l'interstice.

seba

Pour mesurer la distance focale par exemple quand l'objectif est réglé sur la mise au point mini, on peut procéder de la manière suivante : on mesure le rapport de reproduction G1, puis on augmente le tirage de la valeur T (par exemple avec une bague allonge d'épaisseur T) et on mesure le rapport de reproduction G2.
La distance focale est égale à T/(G2-G1).

seba

Exemple pratique de PierreT avec le Micro-Nikkor AF 200/4 à la distance mini de mise au point.

Citation de: PierreT le Novembre 30, 2017, 10:21:41
Voici un montage de deux photos d'une feuille de papier millimétré, réalisées à la distance de mise au point mini, sans bague macro puis avec bagues macro (41,4 mm). La base du capteur du D800 mesure 35,9 mm d'après la doc. Ces photos permettent de calculer expérimentalement une distance focale de 101,5 mm.

Nikon donne 102mm.

Tonton-Bruno

Merci seba.
Très intéressant. Je n'avais pas vu le post de PierreT.

D'après toi, à partir de combien de fois la distance focale peut-on appliquer la formule simple qui ne tient compte que de la focale et de la distance de MaP ?
x10, x20, x25 ?

seba

Citation de: Tonton-Bruno le Janvier 14, 2018, 11:01:35
D'après toi, à partir de combien de fois la distance focale peut-on appliquer la formule simple qui ne tient compte que de la focale et de la distance de MaP ?
x10, x20, x25 ?

Je dirais x20 environ pour une précision de 5%.
Attention, ce n'est vrai que pour un objectif dont la distance focale ne varie pas avec la mise au point.

Tonton-Bruno

Citation de: seba le Janvier 14, 2018, 11:05:23
Attention, ce n'est vrai que pour un objectif dont la distance focale ne varie pas avec la mise au point.
Ah oui, le fameux "focus breathing"...

J'avais constaté qu'il était très important sur mon ancien zoom AF-D 80-200 f:2,8 deux bagues.
Pour mon 70-200 actuel, il me semble que c'est bien moindre, mais je n'ai pas vraiment vérifié.

seba

Citation de: seba le Janvier 14, 2018, 11:05:23
Je dirais x20 environ pour une précision de 5%.

Pour donner une idée, avec un 200mm distance de mise au point 4m (distance objectif-sujet).
Si on calcule 200/4000, on trouve G = 1/20
Calcul précis : d = 4000mm, t = 210,5mm, G = 210,5/4000 = 1/19

PierreT

Bonjour,

Citation de: Tonton-Bruno le Janvier 14, 2018, 11:19:33
Ah oui, le fameux "focus breathing"...
...

Le focus breathing, qui peut être défini comme le taux de variation de l'angle de champ lorsque la distance de mise au point varie de l'infini à une distance donnée (généralement la distance mini de mise au point d'utilisation courante dans un exercice donné), dépend de multiples facteurs. Parmi ceux-ci, on peut considérer l'éventuelle fluctuation de la distance focale du système lorsque la distance de mise au point varie, mais pas uniquement, pas de manière prépondérante et pas de manière simple. Par exemple, un 50 mm très courant à système optique parfaitement figé et de distance focale rigoureusement constante (double gauss sans lentille flottante) présente couramment un focus breathing (FB) de 4% entre l'infini et 1 m ; et de plus de 10% entre l'infini et 0,45 m. Bien que relativement faibles, ces valeurs montrent bien qu'il peut être hasardeux de relier FB et distance focale, qu'elle soit fluctuante ou pas...

Trois exemples pour illustrer (c'est un peu technique, mais les personnes intéressées s'y retrouveront)...

Nota :
Taux de variation de la distance focale : ∆f'/f' = 100 x (f' dmini – f' ∞) / f' ∞
Taux de variation de l'angle de champ : FB = 100 x (Alpha dmini – Alpha ∞) / Alpha ∞

Exemple 1 : AF Micro-Nikkor ED 70-180mm f/4.5-5.6D.

C'est un zoom au comportement assez typique : sa distance focale décroît lorsque le plan de mise au point se rapproche.

Le graphe de gauche présente la distance focale de l'objectif en fonction de la position du variateur pour 3 distances de mise au point différentes : l'infini, 0,8 m et 0,37 m (map mini). La distance focale varie de :
- 72 à 175 mm lorsque la mise au point est sur l'infini ;
- 63 à 117 mm lorsque la mise au point est sur 0,8 m
- 50 à 71 mm à la mise au point mini (certains crieront au scandale !).

Le taux de variation de la distance focale est représenté graphe central. Pour ne pas exagérer artificiellement les valeurs, je n'ai pris en compte que la plage des distances de mise au point comprises l'infini et 0,8 m (photographie courante – zone rouge du graphe précédent). Malgré tout, la variation est importante (de –13 à –33 % selon la position du variateur).

Le troisième graphe représente le focus breathing (FB) de l'objectif, toujours dans la plage des distances de mise au point comprise l'infini et 0,8 m. Malgré un taux de variation de la distance focale assez important, le FB reste faible et relativement "constant" (entre +4 et +5 %).

À noter que cet objectif présente un FB positif (l'angle de champ augmente lorsque la distance de mise au point diminue). On pourrait penser que ceci est dû au fait que la distance focale diminue avec la distance de mise au point, mais le fait que les courbes du taux de variation de la distance focale et du FB n'aient pas du tout la même allure incite à la prudence...

Amicalement,
Pierre

PierreT

Exemple 2 : Zoom-Nikkor 50-135mm f/3.5.

J'ai choisi ce zoom car sa distance focale croît lorsque le plan de mise au point se rapproche (ce qui n'est pas exceptionnel).

À l'infini, c'est un 51-131 mm ; à 1,3 m (mise au point mini), c'est un 58-135 mm.

Le taux de variation de la distance focale entre l'infini et 1,3 m est donc toujours positif (compris entre +3 et +12 % environ).

Le FB de l'objectif est négatif et varie de manière importante entre –15 et –21 % (son angle de champ diminue toujours avec la distance de mise au point).

Là encore, le taux de variation de la distance focale et le FB évoluent de manières différentes (le premier est d'abord croissant, puis décroissant, alors que le FB est toujours décroissant.
Amicalement,
Pierre

PierreT

Exemple 3 : Canon 40-120mm f/2.8 (zoom cinéma).

Contrairement aux deux précédents, la distance focale de ce zoom fluctue très peu lorsque le plan de mise au point se rapproche (taux de variation de la distance focale entre l'infini et 1 m est compris entre 0 et –3 %).

Même avec une distance focale plutôt stable, le FB de cet objectif, bien que relativement faible, est plus important en valeur absolue que celui du Nikkor 70-180 sur la plage des focales allant de 70 à 120 mm. Cet exemple montre bien que la relation entre fluctuation de la distance focale et focus breathing n'est pas simple. Le réel intérêt de cet objectif vient du fait que son FB est inférieur à 4 % jusqu'à la focale de 60 mm et inférieur à 5 % à 70 mm, c'est à dire dans les plages où il est le plus visible.
Amicalement,
Pierre

seba

Ce qui m'épate, c'est comment PierreT peut sortir ces schémas avec toutes ces données en aussi peu de temps.

PierreT

Bonjour,

J'étais en train de terminer l'étude du 70-180 Nikon lorsque je suis tombé sur ce fil. Les deux autres objectifs étaient passés dans ma moulinette il y a longtemps déjà. J'ai juste contrôlé rapidement mes calculs et homogénéisé la présentation...
Amicalement,
Pierre

seba

Citation de: PierreT le Janvier 17, 2018, 11:47:02
J'étais en train de terminer l'étude du 70-180 Nikon lorsque je suis tombé sur ce fil. Les deux autres objectifs étaient passés dans ma moulinette il y a longtemps déjà. J'ai juste contrôlé rapidement mes calculs et homogénéisé la présentation...

Ah OK.
Je pensais que tu t'y étais mis rapidos en tombant sur ce fil.