Quand la musique montre la voie

Démarré par stougard, Avril 09, 2010, 06:13:21

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Lictor

Citation de: Zouave15 le Avril 13, 2010, 14:00:49
La lecture sur papier et d'entités que sont livres et articles n'est pas parfaite, mais permet une bonne mémorisation et un niveau de restitution satisfaisants à un niveau donné. Autrement dit, le lecteur devient plus cultivé et plus intelligent. Le seul point noir et qui nous intéresse est l'image qui, faute d'éducation à sa lecture, est en général mal comprise.

Très d'accord avec toi sur l'image. Sa lecture n'est pas enseignée et donc la plupart des gens ne savent pas quoi en faire. Gênant dans une société où une image vaut 1000 mots. On devrait enseigner l'image *et* Internet. Au lieu de faire des cours d'informatique ridicules qui ne servent à rien.
Pour la restitution et la mémorisation, la question se pose de savoir ce qu'on définit par là. Il y a une dizaine de types de mémoire. La mémoire littérale, c'est un peu le degré zéro.

Il y a aussi un conditionnement qui fait qu'on ne cherche pas pareil sur le net et dans un bouquin. Par exemple, je ne mémorise jamais rien littéralement sur le net : pas la peine, c'est classé, je peux le retrouver, pas la peine de surcharger mon cerveau. En revanche, je mémorise des relations ou des concepts. Ou, si je cherche une information précise, je ne mémorise qu'elle. C'est aussi dû au mode de lecture : un livre, je le lis, une page web, je suis en lecture rapide. Sauf si je lis un livre sur écran. ;)

CitationL'outil est en cause, qui supposerait une éducation spécifique, laquelle n'a aucune chance d'être faite.

C'est un gros problème car une énorme source d'inégalité. De plus, une bonne partie des compétences nécessaires au web le sont également dans les professions de "haut niveau". Par exemple, le propre d'un cadre, c'est de gérer une information sur-abondante et bordélique. Au fond, c'est d'ailleurs aussi le propre d'un citoyen informé.
En excluant ce type d'enseignement, on marginalise en fait une partie de la population.

CitationEt dans tous les cas, du fait de l'outil, il ne va pas de soi d'associer une œuvre quelconque, surtout s'il s'agit d'un bout, à un auteur.

A partir de quel taille de bout peut on arrêter l'association? Le paragraphe, la phrase, le mot?
La littérature classique regorge de citations et de clins d'oeils qui ne sont jamais explicitement liés à leur auteur - ça aurait été vulgaire. Même chose pour la peinture classique et moderne, où la citation est constante mais rarement explicite.
Plus récemment, le problème se pose en musique électronique avec le sampling. A quel degré de citation et de distorsion considère-t'on qu'il y a création et non plus citation? Actuellement, on en est à devoir utiliser l'outil informatique pour retrouver des samples inidentifiables à l'oreille. Est-on encore dans la citation? Il y a bien une oeuvre, pourtant elle peut n'être constituée que de fragments pré-existants.
On peut aussi citer le collage. Il est rare que l'artiste identifie les auteurs de chaque bout de photo qui contribue à son oeuvre. Pourtant, son oeuvre est bien originale.

CitationDonc imaginer que le libre sera associé à l'auteur est une douce illusion. Les gens prendront pour en faire autre chose et éventuellement n'importe quoi, perdront totalement le contexte comme c'est déjà le cas, et c'est toute la culture qui s'écroulera.

Si l'on part du principe qu'en art tout a déjà été fait, la seule chose qui reste encore à faire, c'est soit de plagier l'ancien, soit de le recomposer...

CitationLa seule solution aujourd'hui, et je ne dis pas que ça ne peut pas changer demain si l'éducation à l'outil se développe, est de conserver des auteurs clairement identifiés, donc leurs blogs ou sites, sans possibilité d'en extraire ce qu'on veut pour en faire autre chose. Leur lecture et leur usage privé est gratuit et libre, c'est déjà pas mal, je pense !

Pourtant, l'identification des sources est le fondement même de Wikipédia. Les licences imposent toutes l'identification de l'auteur. Mais il y a pas mal d'auteurs qui ne souhaitent pas être identifiés. C'est le cas sur les blogs, où l'anonymat permet d'envisager à la fois une carrière et le droit d'expression...

CitationCertains font confiance à l'humain qui apprendra. Oui mais la courte histoire d'internet ne va pas dans ce sens. Des sites on est passés aux blogs, avec une tenue moindre des articles. Les blogs se professionnalisent, et les autres passent à Twitter, le microblog.

Il y un mélange des usages du net. L'article et le micro-blog n'ont pas la même finalité, pas plus que la conférence et le coup de téléphone. Internet est beaucoup de choses à la fois.
Le microblog, c'est du Télecom et d'agora, pas de la connaissance. A la limite, la dimension créative du microblog est plutôt dans le champs de l'expérimentation sociale et de la création collective de contenu.

geargies


Lictor

 [at] Argos

Je peux aussi changer de méthode ;)

Mais c'est une pratique, certes un peu vieux jeu, mais culturelle sur le net... Ça évite de perdre le contexte et ça réduit (un peu) les ambiguïtés. Même si je remarque qu'elle est moins utilisée qu'avant...
C'est aussi une adaptation au spécificité du média : on est certes dans l'écrit, mais on est aussi dans une communication proche de l'instantanée de l'oral. Sauf qu'à l'oral, on alterne les questions et réponses, alors que là on y va par paquets entiers. Un forum, ce n'est pas vraiment de l'écrit, au sens littéraire, mais pas de l'oral non plus. Bref, il faut bien trouver un moyen de faire avec les contraintes, et la réponse par fragments de citation est une solution comme une autre.

Pour les grandes envolées littéraires, je veux bien, mais avec la limitation à 5000 mots par messages, on va passer plus de temps à condenser les envolées qu'à les rédiger...

Lictor

Citation de: geargies le Avril 13, 2010, 17:18:20
Dites donc vous bossez quand???

Entre deux messages. ;) Avec le ralentissement économique, il n'y a pas forcément le boulot nécessaire pour combler une journée de travail salarié. Je serais bien au boulot de 11h à 16h, ce qui suffirait à couvrir la quantité de travail qu'on veut bien me donner, mais on me dit que ce n'est pas possible et qu'il faut se tenir aux horaires officiels. Du coup, je n'ai que deux choix : soit me mettre à bosser beaucoup plus lentement, soit alterner des phases de travail à vitesse normale avec d'autres activités. Je préfère largement la seconde solution, moins déprimante et qui dégrade moins la capacité de travail...

Pour les autres, je sais pas, mais je peux supposer retraite, chômage, activité indépendante, sous-emploi ou ralentissement économique...

Zouave15

Moi aussi je préfère dans ce cas les réponses globales car nous ne sommes pas forcément opposés, au moins en bien des points, que nous avons des expériences qui manifestement se recoupent, mais que nous n'en tirons pas toujours les mêmes conclusions. Nous sommes au niveau des opinions et pas forcément en désaccord sur les constats, donc la réponse globale me semble adaptée. En outre, s'il fallait vraiment répondre sur chaque point, on serait en mode foisonnant, et sur chacune de tes phrases, chacune de mes réponses ferait largement deux mille signes.

Et comme on se respecte comme interlocuteurs, on peut chacun développer sa pensée sans risque d'être trahi.

Au sujet de savoir si on travaille ou non, d'une part en ce moment je scanne beaucoup, d'autre part écrire et réfléchir fait partie de mon travail, et me donne des idées pour d'autres choses. Et enfin j'écris comme je parle, juste la relecture en plus.

Zouave15

Lictor, je crois que tu analyses trop les choses en fonction de ton expérience. Sur le sujet des modes de pensée et des stratégies d'apprentissage, je vois très bien à quoi tu fais allusion : j'ai beaucoup bossé là-dedans, j'ai créé des méthodes qui ont fait à l'époque ma fortune, et j'ai même écrit un livre intitulé « De la simple lecture à la maîtrise de l'information ».

J'étais dans le contexte formation pour adulte, et j'ai travaillé essentiellement avec des cadres de tous niveaux. Tu serais surpris de voir à quel point nombreux sont ceux qui ont du mal à intégrer les méthodes de structuration des idées, par exemple, ou même simplement une bonne préparation à la lecture d'un texte. J'ai pas mal bossé en cours particulier pour préparer des étudiants de MBA : idem !

Quand ces méthodes ne sont pas enseignées assez jeune, il est difficile de les acquérir, et le résultat est moyen. Mais espérer que l'école le fasse, c'est un vœu pieu ! Il faudrait tout revoir de A à Z, en commençant par les objectifs et la mesure des résultats, et former les profs, ce qui inévitablement se transformerait en charabia d'inspecteur féru de sciences de l'éducation. Le résultat comme le fut l'application bête et sans nuances de la méthode globale, serait probablement catastrophique.

Avec internet et le libre, que je n'oublie pas car il en est partie intégrante, on est dans un modèle qui pourrait être formidable mais qui s'avère élitiste par défaut de formation, comme tu le soulignes. Quant on sait travailler, on s'approprie facilement internet ; je n'y suis allé pour la première fois qu'en 2004 et maintenant il est mon outil de travail principal (et l'était déjà deux ans après ma première incursion).

Des philosophes et des sociologues, tout comme des psychologues cognitifs, des spécialistes en sciences de l'éducation ou en sciences cognitives en sont aujourd'hui à s'inquiéter, à faire des recherches pour éviter le pire, etc. C'est une réalité, et si ces gens s'inquiètent, c'est fondé.

Mais en fait leur seul pouvoir est surtout dans l'amélioration des écrans, avec le développement et bientôt la généralisation de l'encre liquide, qui règle une partie des problèmes de lecture et de mémorisation (mais pas tous).

Zouave15

#106
Pour internet, ils butent sur le fait que le fonctionnement et les acteurs en sont commerciaux, et ce d'autant plus qu'ils sont gratuits, contrairement à ce qu'on pourrait penser a priori, car le gratuit est financé par la publicité. Alain Giffard par exemple parle de négocier avec Google, ça en dit long.

Dans cet ensemble le libre n'est pas une solution car il est au contraire partie intégrante du problème, amenant des « briques » sans critère connu (si ce n'est la narcissisme) et en dehors d'un réseau de maillage, pourtant nécessaire à leur utilisation réelle.

La concurrence à la visibilité est en outre farouche et ne favorise pas forcément (et même rarement) les contenus les plus attractifs. Le succès de Wikipédia empêche indirectement le développement d'autre chose de mieux car il n'y a plus la place, Google tue dans l'œuf d'autres types de moteurs, les blogs fréquentés éclipsent d'autres plus difficiles d'accès, etc. Je sais, tout cela est fluide quand même car toute position peut être remise en cause, mais beaucoup de gens ont l'impression naïve qu'on sort du système économique, alors qu'on est en plein dedans en pire, au niveau mondial et avec élimination directe.

Bien sûr que certains, dont nous, s'y retrouvent (je bosse à plus de 90 % par contacts via le net, et ma femme 100 %)) autant sur l'aspect financier que culturel, mais une fracture risque de se produire avec l'essentiel de la population, moins formée à apprendre, chercher et réfléchir, et qui a moins de temps.

On ne pourra pas l'empêcher mais on peut réfléchir à la minimiser, et ne pas donner toutes les clés aux acteurs économiques.

Pour en revenir à la photo, internet permet évidemment à tout amateur de se faire connaître, et pourtant beaucoup sont déçus, les sites sont abandonnés, les contacts ne se font pas, etc., et donc finalement ce qui semblait un outil pour diffuser la création aboutit à l'inverse. Pourquoi ?

Tout simplement parce qu'en toute chose il y a un ticket d'entrée, le plus souvent c'est l'argent, parfois la culture, la formation ou l'intelligence, mais pour internet c'est le temps. Or l'amateur aurait l'argent mais pas le temps, au-delà de quelques aimables bidouillages. Quelle différence entre avoir un blog et l'alimenter en contenu varié tous les deux jours ! Mais c'est la condition pour exister, avoir des contacts, et aussi, in fine, créer.

On ne va ni refaire internet ni refaire l'éducation, je dis simplement à travers mes développements l'illusion qu'il représente, et le danger supplémentaire que font peser la généralisation du gratuit, d'une part (car il signifie une pression plus forte au plan économique via la recherche de visibilité donc de pub), et l'idée absurde que le libre puisse être une solution à quoi que ce soit - du moins, pour la création. Pour l'information et l'éducation, ça devrait pouvoir marcher, et pourtant ça n'est pas convaincant.

Mais bon, tout cela ne m'empêche pas de trouver internet formidable et de travailler dessus, par contre la double idée du gratuit (au-delà de la consultation) et du libre me hérisse (on l'a compris).

stougard

Citation de: Zouave15 le Avril 13, 2010, 20:38:42
Mais bon, tout cela ne m'empêche pas de trouver internet formidable et de travailler dessus, par contre la double idée du gratuit (au-delà de la consultation) et du libre me hérisse (on l'a compris).

C'est dommage que tu n'ais pas encore compris qu'ils sont absolument indissociables. Sans le gratuit et sans le Libre, l'Internet n'existerait pas car il s'appuie a 99% sur du Libre.

C'est dommage que tu n'ais pas encore compris que le Libre represente une tres grosse majorite de notre culture et que par extension, une tres grosse majorite de notre culture est ... gratuite.

D'ailleurs, je ne vois meme pas a quoi tu peux l'opposer. On ne peut pas echanger chaque idee, chaque parole ... contre argent sonnant et trebuchant.

Will à l ouest

La vache ! Une fois de plus, certains ici ont tellement décidé que Stougard était un troll qu'il oublient tout à coup de réfléchir.

Allons, ou c'est un troll et passez votre chemin, ou (quelle que soit l'affection que vous lui portez) il soulève des points intéressants et utilisez votre cerveau pour débattre.

CitationEt oui le modèle des droits d'auteur profite aux...auteurs...  Grimaçant
Pratiquement faux aujourd'hui dans le domaine de la musique (et pas que).

Je crois qu'il n'y a que dans la photo que le droit d'auteur profite encore aux auteurs (et encore, pas sur). Dans tous les autres domaines, ce sont les producteurs, éditeurs et les revendeurs qui se goinfrent la plus grosse part du gâteau (je mets un bémol sur le domaine de la littérature que je connais trop mal).

C'est une des raisons pour lesquels des compositeurs mettent leurs oeuvres en CC : marre d'engraisser plein de cochons au passage, autant que ça soit gratuit et que tout le monde en profite sans être délinquant.

Je vais plus loin. Le droit d'auteur a été créé au départ (pour la littérature d'ailleurs) pour protéger les créateurs de la rapacité des éditeurs. Aujourd'hui, elle sert la rapacité des éditeurs, mais bride considérablement les créateurs.
Des exemples ? Les affaires des éditions Moulinsart...

CitationOn nous fait croire qu'internet c'est mieux pour la culture et le partage. Mais toutes les études démontrent absolument le contraire.
Quelles études ? Des sources ?
CitationEn fait, on est revenu à l'époque des troubadours, comme je disais, d'une culture orale. Quelles sont les caractéristiques d'une telle culture ? Un niveau d'autonomie et de réflexion faibles voire nuls, et une productivité de nouveaux concepts proche de zéro.
Effectivement. Les gens qui sont partis comme des veaux en 14, 39, 54 et autres se faire trucider ou trucider leurs voisins disposaient d'une autonomie et d'un niveau de réflexion élevée.
Quand je discute avec des ados d'aujourd'hui, pure génération internet, il y en a un paquet qui me scotchent sur leur connaissance du monde, leur ouverture d'esprit etc.
Faut pas faire d'angélisme. On est dans une société de l'immédiateté, de l'émotionnel, etc. Mais "la société du spectacle" n'a pas été écrit hier que je sache. Et la notion de fétichisme de la marchandise encore moins.

Internet est comme tout : des apports extraordinaires et des dérives. Mais c'est un outil jeune. Comme toute nouveauté, il suscite d'abord fascination et enthousiasme, puis appropriation et enfin adaptation. On en est encore qu'à la phase d'appropriation. L'adaptation viendra.
Rappelez-vous l'arrivée du téléphone portable : ceux qui en avaient se comportaient comme des malotrus. On disait que le jour où tout le monde en aurait un, la vie en société serait invivable. Il y a toujours des malotrus, mais globablement, les gens ont appris à couper leur portable au cinéma, à téléphoner sur les plateforme dans les trains et à rejeter les appels au restau.

Will à l ouest

Je voulais souligner l'intérêt que j'ai pris aux interventions de Lictor et à celles du Zouave, même si je suis très majoritairement en désaccord avec lui.