Entre 2 bruits, le moindre ?

Démarré par Pat.Jack, Juillet 03, 2014, 21:34:50

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balfly

Bonsoir

Je me suis un peu intéressé à la question de l'accroissement du bruit avec les poses longues.
J'ai fait une mesure avec mon appareil Olympus EM1.
En Raw, analysé avec le logiciel Rawdigger, avec l'option "Subtract Black off".
J'ai comparé le bruit dans les ombres profondes, présenté sous forme d'un écart-type, pour 2 sensibilités et pour 2 temps de pose :
200 ISO 1/15 s : bruit = 0,778
200 ISO 10 s : bruit = 1,33 ***
6400 ISO 1/15 s : bruit = 9,63
6400 ISO 10 s : bruit = 26,12 ***

J'ai mis *** aux 2 cas qui nous intéressent directement ici :
sous 200 ISO 10 s le bruit est 20 fois plus faible que sous 6400 ISO 1/15 s.
Il est donc clair ici qu'il vaut largement mieux poser longtemps sous 200 ISO que peu de temps sous 6400 ISO.

Il est certain que mon étude n'est pas exhaustive, il ne s'agit ici que du bruit dans les ombres profondes, et il serait intéressant de voir l'évolution en faisant croître progressivement les ISO et la durée, ce qui ne présenterait pas de grande difficulté.  De plus c'est limité au cas de mon appareil.

Finalement je viens de compléter l'étude, en regardant cette fois l'influence du bruit au niveau non plus du noir profond mais du gris de référence, en cherchant l'exposition automatique sur une surface uniforme avec un fort décalage de mise au point pour éviter tout détail de la surface, afin qu'il ne reste plus que le bruit. J'ai obtenu :
200 ISO   2 s     f/18    bruit = 7,8
6400 ISO 1/25 s  f/6,3   bruit = 39,4
Le rapport est significatif : 5, il vaut mieux poser longtemps !

Cordialement

astrophoto

Tout ça se déduit facilement si on ne perd pas de vue que photographier signifie capter la lumière (le signal), et que plus on en capte meilleur est le rapport signal/bruit. A l'extrême, quand il n'y a plus de lumière il n'y a que du bruit.

Pour en capter plus, il n'y a pas 36 solutions, seulement deux : ouvrir le diaph ou rallonger le temps de pose.

La montée en iso ne change pas d'un iota la quantité de lumière qui parvient au capteur. C'est un cache-misère qui permet de camoufler la sous-exposition, avec un résultat plus ou moins satisfaisant. Nécessaire en jpeg pour faire rentrer la dynamique de l'image dans les 8 bits, peu utile en raw avec les appareils à bruit de lecture quasi constant (genre D810), un peu plus sur les autres (ex : Canon).

:)
Thierry Legault
astrophoto.fr

astrophoto

Un mot sur les pixels chauds. C'est la partie émergée du signal thermique (souvent appelé bruit thermique mais je l'appelle signal car il est reproductible, au contraire des autres bruits qui sont aléatoires : bruit de photons, bruit de lecture).

Etant reproductible (chaque pixel a toujours le même comportement, à température et temps de pose constants), on peut le soustraire en faisant une seconde pose obtu fermé et en la soustrayant de la première. C'est ce que font les appareils en mode "réduction de bruit longue pose".

Mais derrière les pixels chauds, dans chaque image il y a le bruit de lecture. En faisant deux poses et en les combinant (que ce soit par addition ou par soustraction), on multiplie le bruit de lecture par 1,4 (racine de 2). On augmente donc le bruit de fond de 40%, et on perd par la même occasion 1/2 IL de dynamique. Ca, les constructeurs ne le disent jamais, et je pense que peu de bouquins le disent aussi...

Je ne conseille donc d'activer ce mode que s'il s'avère que les pixels chauds sont trop nombreux après développement pour être effacés avec un coup de tampon. Personnellement je ne l'active jamais (je n'aime pas perdre 30s pour chaque pose de 30s, surtout quand je fais des time-lapse) et ça se passe plutôt bien sur des poses genre 30s à 3200 iso.



:)
Thierry Legault
astrophoto.fr

dioptre

Citation de: astrophoto le Juillet 22, 2016, 23:40:34
Un mot sur les pixels chauds. C'est la partie émergée du signal thermique (souvent appelé bruit thermique mais je l'appelle signal car il est reproductible, au contraire des autres bruits qui sont aléatoires : bruit de photons, bruit de lecture).

Etant reproductible (chaque pixel a toujours le même comportement, à température et temps de pose constants), on peut le soustraire en faisant une seconde pose obtu fermé et en la soustrayant de la première. C'est ce que font les appareils en mode "réduction de bruit longue pose".

Mais derrière les pixels chauds, dans chaque image il y a le bruit de lecture. En faisant deux poses et en les combinant (que ce soit par addition ou par soustraction), on multiplie le bruit de lecture par 1,4 (racine de 2). On augmente donc le bruit de fond de 40%, et on perd par la même occasion 1/2 IL de dynamique. Ca, les constructeurs ne le disent jamais, et je pense que peu de bouquins le disent aussi...

Je ne conseille donc d'activer ce mode que s'il s'avère que les pixels chauds sont trop nombreux après développement pour être effacés avec un coup de tampon. Personnellement je ne l'active jamais (je n'aime pas perdre 30s pour chaque pose de 30s, surtout quand je fais des time-lapse) et ça se passe plutôt bien sur des poses genre 30s à 3200 iso.



:)
Il y a quand même de quoi s'y tromper quand le constructeur dit réduction de bruit et qu'en fait on aurait une augmentation du bruit ( de lecture )
Il y a cependant une mise en garde dans la doc du 5dsR :
"les images prises a la sensibilité de 1600 iso ou plus peuvent sembler plus granuleuses avec le réglage activé que désactivé"
Pourquoi 1600 iso ou plus ?

ekta4x5

#29
Citation de: astrophoto le Juillet 22, 2016, 23:25:02
Tout ça se déduit facilement si on ne perd pas de vue que photographier signifie capter la lumière (le signal), et que plus on en capte meilleur est le rapport signal/bruit. A l'extrême, quand il n'y a plus de lumière il n'y a que du bruit.

Pour en capter plus, il n'y a pas 36 solutions, seulement deux : ouvrir le diaph ou rallonger le temps de pose.

La montée en iso ne change pas d'un iota la quantité de lumière qui parvient au capteur. C'est un cache-misère qui permet de camoufler la sous-exposition, avec un résultat plus ou moins satisfaisant. Nécessaire en jpeg pour faire rentrer la dynamique de l'image dans les 8 bits, peu utile en raw avec les appareils à bruit de lecture quasi constant (genre D810), un peu plus sur les autres (ex : Canon).

:)

Merci pour ces explications Astro.
Mon but était de rappeler aux débutants que la montée en isos des capteurs était un leurre.En effet trop de débutants s'imaginent encore (peut être même des non débutants) que monter en isos est la même chose qu'en argentique  changer d'un film bassse sensibilité  pour un de plus grande sensibilité la lumière se révélant insuffisante pour le premier.
Les progrès des capteurs (numériques) des appareils digitaux  apparus ces  dernières années ont permis une nouvelle approche dans la gestion de la sensibilité.
Avec certains capteurs 12000isos sont utilisables ce qui a  ouvert des perspectives en photos sportive et animalière impensables il y a peu encore.
Il n'en reste pas moins que chaque capteur a une sensibilité nominale (la plupart du temps t entre 100 et 200isos). Pour monter en sensibilité, l'apn va amplifier le signal mesuré par son capteur. Seulement ,il y a un Hic, cette amplification va générer un signal parasite lequel va être d'autant plus élevé  et visible que le signal original aura été amplifié; (comme le souffle sur un signal audio.)
C'est le bruit numérique ,bruit qui va induire une moindre définition  dans les contours les plus fins de l'image et d'autre part, mais c'est moins visible  parce que l'on va perdre des informations,et de la dynamique.
Certains facteurs influent également comme la taille du capteur ,l'expo à droite ou à gauche etc..je renvoie ceux que cela intéresse aux livres techniques.(notamment aux articles de Thierry Dehesdin que je remercie au passage
On trouve certes des logiciels spécialisés dans le traitement a posteriori du  bruit mais la photo obtenue n'aura jamais  la définition, le piqué que l'on aurait eu'  si la photo avait été prise avec une sensibilité plus basse.
J'en reviens donc à mon conseil d'utilisation d'un bon trepied chaque fois que cela est possible .

J'ai bon Astro ?

seba

A propos de films, j'ai une question.
Est-ce qu'on peut faire une analogie entre un film et un capteur en ce qui concerne le bruit en pose longue ?
Car il me semble que pour les films, on peut poser aussi longtemps qu'on veut, ça n'entraîne aucun inconvénient.

jaric

Citation de: seba le Juillet 23, 2016, 12:24:48
A propos de films, j'ai une question.
Est-ce qu'on peut faire une analogie entre un film et un capteur en ce qui concerne le bruit en pose longue ?
Car il me semble que pour les films, on peut poser aussi longtemps qu'on veut, ça n'entraîne aucun inconvénient.

Aucun inconvénient en termes de bruit peut-être, mais il faut tenir compte du comportement non linéaire de la sensibilité des films (effet schwarzschild).
En couleurs, on peut même avoir des dérives importantes d'équilibre chromatique, dues aux différences de comportement des trois couches de pigments photosensibles.

astrophoto

oui, il y a le défaut de réciprocité : la réponse du film chute aux faibles éclairements (et non en longue pose comme on l'a souvent lu : oui les faibles éclairements conduisent en général à des longues poses, surtout à l'époque des films qui ne montaient guère au-dessus de 800 iso, mais ce n'est pas la longueur de la pose elle-même qui génère cette chute de sensibilité, c'est bien le niveau de lumière très bas). Ca a pourri la vie de générations d'astronomes, jusqu'à la révolution numérique (dans les années 80 pour les pros et 90 pour les amateurs, bien avant que ça apparaisse dans les rayons de la fnouc : j'avais vidé ma tirelire pour mon premier bidule à capteur CCD de 1/2 Mpixel en 1993  :D).
Thierry Legault
astrophoto.fr

astrophoto

#33
Citation de: ekta4x5 le Juillet 23, 2016, 12:07:27
(...)
Seulement ,il y a un Hic, cette amplification va générer un signal parasite lequel va être d'autant plus élevé  et visible que le signal original aura été amplifié; (comme le souffle sur un signal audio.)
(...)
J'ai bon Astro ?

oui je pense :)

Je mettrais juste un petit bémol sur la phrase que j'ai gardée en citation.

Ce n'est pas l'amplification iso qui génère du bruit (je préfère ce mot à "signal parasite", qui peut prêter à confusion), elle ne fait que l'amplifier plus ou moins.

Il ne faut pas voir le bruit comme quelque chose qui se rajouterait au reste, une salissure qui se superposerait à un signal "propre". Le bruit fait partie intégrante du signal qu'il accompagne, c'est une variation aléatoire et non reproductible de ce signal (là je parle pour les vrais bruits, pas du "bruit thermique" qui génère les pixels chauds et qui, lui, est reproductible en faisant une 2ème pose à la suite).

Par exemple, le bruit de photons est dû au fait que les photons arrivent de manière désordonnée, comme les gouttes de pluie sur le sol. Sur une photo d'un objet uniformément éclairé, dans un monde idéal chaque pixel aurait reçu un nombre égal de photons. Dans le monde réel, il y a des variations plus ou moins importantes du nombre de photons reçus entre un pixel et son voisin (ça c'est la composante spatiale du bruit) et d'une pose à l'autre pour un même pixel (ça c'est sa composante temporelle).

Concernant le réglage iso, il n'est pas néfaste en lui-même (là encore, beaucoup de gens font un raccourci), c'est la sous-exposition (qui pousse à monter en iso) qui l'est. Pour le rapport signal/bruit des photons, à expo égale le réglage iso ne change rien (même nombre de photons, donc même bruit de photons aussi). Pour le bruit de lecture, la montée en iso est bénéfique : ça le diminue. Par exemple, sur le 6D on passe de 25 électrons de bruit de lecture à 100 iso à moins de 2 électrons à 6400 iso. C'est d'ailleurs, en raw, le seul intérêt de monter en iso : faire baisser le bruit de lecture. Evidemment, comme on l'a vu rallonger l'expo c'est encore bien mieux que de monter en iso, si on peut bien sûr.

:)
Thierry Legault
astrophoto.fr

jaric

Citation de: astrophoto le Juillet 23, 2016, 17:35:44
Le bruit fait partie intégrante du signal qu'il accompagne, c'est une variation aléatoire et non reproductible de ce signal (là je parle pour les vrais bruits, pas du "bruit thermique" qui génère les pixels chauds et qui, lui, est reproductible en faisant une 2ème pose à la suite).

Tu as bien fait mettre entre guillemets cette expression car le phénomène auquel tu fais référence n'est pas un bruit au sens propre du terme.
Le bruit thermique en électronique est généré par l'agitation thermique des électrons et est un bruit blanc (totalement aléatoire donc); il n'est de plus que l'extension de phénomènes dus à l'agitation désordonnée de particules dans un milieu donné - liquide ou gaz - (mouvement brownien).
Ce terme adopté pour les capteurs n'est donc pas particulièrement bien choisi !

astrophoto

Citation de: jaric le Juillet 23, 2016, 18:40:20
Tu as bien fait mettre entre guillemets cette expression car le phénomène auquel tu fais référence n'est pas un bruit au sens propre du terme.
Le bruit thermique en électronique est généré par l'agitation thermique des électrons et est un bruit blanc (totalement aléatoire donc); il n'est de plus que l'extension de phénomènes dus à l'agitation désordonnée de particules dans un milieu donné - liquide ou gaz - (mouvement brownien).
Ce terme adopté pour les capteurs n'est donc pas particulièrement bien choisi !

absolument, les termes utilisés produisent souvent de la confusion. C'est d'autant plus vrai que le signal thermique (pixels chauds) est reproductible...enfin presque. Si on regarde le comportement d'un pixel chaud d'une pose à l'autre, il est quasiment identique, mais pas tout à fait : la valeur varie un petit peu. Ce petit peu est un bruit : j'ai dit plus haut que tout signal s'accompagnait d'une incertitude (un bruit), et le signal thermique n'y fait pas exception. Les pixels chauds sont un faux bruit (un bruit fixe si on veut) dans lequel se cache un vrai bruit (aléatoire). Et c'est là où, si on n'emploie pas les bons termes, on mélange tout  :D
Thierry Legault
astrophoto.fr

jaric

Citation de: astrophoto le Juillet 23, 2016, 22:18:45
Les pixels chauds sont un faux bruit ...
  :D

Comme la rumeur, quoi  ;D

Bon, c'est plus poétique que de dire phénomène déterministe avec composante stochastique !