Dix mille euros de dommages-intérêts pour avoir utilisé des photos sans autoris

Démarré par marthouret, Juin 14, 2011, 09:31:41

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marthouret

Dix mille euros de dommages-intérêts pour avoir utilisé des photos sans autorisation

Publié par : http://www.localtis.info/
Le : vendredi 10 juin 2011

Dans un jugement du 1er juin 2011, la cour d'appel de Nancy a condamné Michel Dinet, le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle, à 10.000 euros de dommages-intérêts pour avoir méconnu les droits d'auteur d'un photographe. En 2003, un photographe professionnel de Nancy, qui intervenait régulièrement pour le département sous la forme de contrats de travail temporaires, avait réalisé plus de 900 clichés sur le canton de Colombey-les-Belles, dont Michel Dinet est l'élu. En 2004, le photographe découvre qu'une trentaine de ces photos ont été utilisées dans le journal des cantonales publié par le candidat. Depuis lors, il réclamait au président du conseil général le paiement de droits d'auteur sur ces images, en faisant valoir qu'elles correspondaient à une commande passée par l'élu. Dans un premier temps, sa demande avait été rejetée par le tribunal de grande instance de Nancy. Mais la cour d'appel a infirmé cette décision. Elle a en effet écarté l'argument avancé par Michel Dinet, qui faisait valoir qu'il s'agissait là d'un travail bénévole, n'ayant donné lieu à aucun contrat. La cour d'appel a considéré, au contraire, que si même les droits d'auteur avaient été effectivement cédés à titre gratuit, cette cession, entrant dans le cadre du Code de la propriété intellectuelle, aurait dû donner lieu à un contrat écrit. Elle rejoint ainsi l'argumentation du plaignant, qui affirmait n'avoir pas été informé de l'usage qui allait être fait de ses photos et n'avoir perçu aucune rémunération. La cour a toutefois ramené les 60.000 euros demandés à 10.000 euros. Le président du conseil général a, pour sa part, indiqué qu'il n'excluait pas de se pourvoir en cassation.

stougard

Citation de: marthouret le Juin 14, 2011, 09:31:41
Dix mille euros de dommages-intérêts pour avoir utilisé des photos sans autorisation

C'est amusant qu'à chaque fois qu'on lit le compte rendu d'un tel procès, c'est parce que l'auteur a travaillé d'abord bénévolement, puis il la joue vierge effarouchée parce qu'on a utilisé ses photos.

De là à dire que le type a un peu poussé à la consommation pour pouvoir faire un procès, il n'y a qu'un pas que je suis pret à faire (surtout qu'il y allait pas de main morte sur le montant demandé).

adonis

10.000 euros pour 33 photos publiées, ça fait 330 euros la photo.  Pas mal !

Il était tiré à combien, ce Journal des Cantonales ?
Et c'étaient toutes des pleines pages? Ou juste des vignettes ?

Tant mieux pour le photographe s'il a obtenu ça, mais je trouve quand même que ca fait cher la photo publiée dans un petit canard de chef lieu de canton. Là, ils explosent carrément le tarif UPC !  ;)

jm_gw

Citation de: adonis le Juin 14, 2011, 11:44:19
10.000 euros pour 33 photos publiées, ça fait 330 euros la photo.  Pas mal !

pas tant que cela finalement car s on applique la règle 'photo publiée sans autorisation écrite' = +100% on est à pein à 1000 balles la tof ... le double d' une CPostale (autrefois)

Reflexnumerick

Citation de: stougard le Juin 14, 2011, 10:45:57
C'est amusant qu'à chaque fois qu'on lit le compte rendu d'un tel procès, c'est parce que l'auteur a travaillé d'abord bénévolement, puis il la joue vierge effarouchée parce qu'on a utilisé ses photos.

...

Citation de: adonis le Juin 14, 2011, 11:44:19
10.000 euros pour 33 photos publiées, ça fait 330 euros la photo.  Pas mal !

....
oooh et pour un p'tit coup de quéquette 15 ans de prison c'est beaucoup aussi, non ? ....  ;) et puis comme elle était en minijupe, c'est elle qui a poussé à la consommation, hein ?  ;)

marrant comme les cerveaux de certains se vident quand ils défendent leur cause....perdue!  ;)

S5 pro-x10-xa1

Philippe-C

10 000€ , frais d'avocat déduit il lui reste dans le meilleur des cas 1000€ et si  il a de la chance.....!!! Avant d'engager une procédure ; il faut être sûr de son coup , car bien souvent la partie adverse joue sur le fait qu'elle a les moyens d'engager une action en justice ou d'y répondre. De plus tout dépend de la façon dont le photographe attaque, ici il aurait mieux valu attaquer pour escroquerie plutôt que non respect des droits.

Joëlle Verbrugge

j'ai en effet un article en préparation sur cette décision intéressante.
J'attends d'en recevoir la copie intégrale pour faire un commentaire éclairé.

Ce qui est également dommage, c'est qu'en tapant le nom du photographe on voit qu'il bosse souvent pour des microstocks.. j'ai donc conseillé à demi-mots à son avocat de lui faire comprendre que si l'adversaire tombait sur cela, il aurait beau jeu d'invoquer que la valeur des photos n'était pas en elle-même si évidente que ça.

Cela étant, la décision rendue reste une jolie victoire en elle-même, donc j'en parlerai comme d'une bonne leçon pour l'élu en question....


RioBravo

Ce qui me chiffonne, précisément, c'est que le gagnant de l'instance ait fait 900 photos dans le canton du président du conseil général, tout en étant rémunéré par le département. A moins qu'il n'en ait fait autant dans chaque canton du département, ce dont je doute, il y a, au mieux, une faute déontologique du photographe, au pire un conflit d'intérêt pour l'élu.

Ni l'un ni l'autre ne me paraissent irréprochables, dans cette affaire, et le président ferait sûrement mieux d'éviter la Cour de Cassation... Il est vrai que ces dix mille euros, frais déduits, ça ne fait pas lourd. Mais l'important est le principe : cette propension qu'ont certaines entreprises ou collectivités à s'approprier sans vergogne une production protégée par le droit d'auteur. Dans ces cas-là, la justice sait frapper fort et c'est tant mieux.
Jean

adonis

Plusieurs contrats temporaires pour faire juste 900 photos ...  ::) ::) ::) ::)

Ils auraient dû prendre PEP pour photographe !  900 photos, il te fait ça en une soirée !   :D :D :D :D :D

vernhet

Citation de: Philippe-C le Juin 14, 2011, 12:56:05
10 000€ , frais d'avocat déduit il lui reste dans le meilleur des cas 1000€ et si  il a de la chance.....!!! Avant d'engager une procédure ; il faut être sûr de son coup , car bien souvent la partie adverse joue sur le fait qu'elle a les moyens d'engager une action en justice ou d'y répondre. De plus tout dépend de la façon dont le photographe attaque, ici il aurait mieux valu attaquer pour escroquerie plutôt que non respect des droits.
a priori la parie condamnée l'est aussi aux dépens...

marthouret


Et par delà la question qui nous intéresse en tant que photographe, reste le coût des photos qui devrait être comptabilisé dans les frais de campagne du président du CG. Si la facture devient salée, il y a un risque d'être déclaré inéligible pour dépassement des frais de campagne. En tout cas sa déclaration en l'état est fausse !!!

marthouret

Citation de: B12 le Juin 14, 2011, 15:41:16
On se dirige vers un cas d'école. 
C'est bien possible !

A ceux qui s'interrogent sur le fait que les photos aient été faites/commandées pour le compte du CG : c'est peut être le cas. Mais en aucun cas ça n'autorise un candidat à des élections (même président sortant du CG) à utiliser pour sa campagne des matériaux photographiques réalisés par le CG, donc avec les moyens et/ou l'argent du contribuable départemental.

Je ne suis pas juriste, mais je pense qu'il y a une qualification juridique bien précise pour ce genre de "détournement". C'est la même chose que d'utiliser les moyens d'imprimerie du CG pour imprimer ses tracts, ou faire payer les petits fours du meeting de campagne sur le budget réception du dit CG.

A suivre...


laurent.f

Citation de: marthouret le Juin 14, 2011, 15:03:05
Et par delà la question qui nous intéresse en tant que photographe, reste le coût des photos qui devrait être comptabilisé dans les frais de campagne du président du CG. Si la facture devient salée, il y a un risque d'être déclaré inéligible pour dépassement des frais de campagne. En tout cas sa déclaration en l'état est fausse !!!

Le code électoral a prévu ce cas là. Dès lors qu'il est fait usage de photos réalisées pour l'institution (en l'occurrence le Département/Conseil général), les photos peuvent être "éventuellement" utilisées dans le cadre d'une campagne en échange d'un paiement d'un droit d'usages des photographies. Le législateur a prévu ce cas là mais le président de ce département, a sans doute été mal conseillé.
Toute la difficulté repose sur la communication électorale qui est plus sévèrement encadrée dans les mois qui précèdent une élection. dans le cas d'une cantonale, les comptes de campagne ne s'appliquent que pour les cantons supérieurs à 9 000 habitants.
Dans les cantons de moins de 9000 habitants, les candidats ne sont pas soumis à l'obligation d'ouvrir un compte de campagne. En Conséquence, les dépenses électorales ne sont pas plafonnées, les candidats ne sont pas tenus de désigner un mandataire financier.
Si cela intéresse quelqu'un mais courage : http://www.cnccfp.fr/index.php?r=2

laurent.f

Citation de: marthouret le Juin 14, 2011, 15:52:11
C'est bien possible !

A ceux qui s'interrogent sur le fait que les photos aient été faites/commandées pour le compte du CG : c'est peut être le cas. Mais en aucun cas ça n'autorise un candidat à des élections (même président sortant du CG) à utiliser pour sa campagne des matériaux photographiques réalisés par le CG, donc avec les moyens et/ou l'argent du contribuable départemental.

Je ne suis pas juriste, mais je pense qu'il y a une qualification juridique bien précise pour ce genre de "détournement". C'est la même chose que d'utiliser les moyens d'imprimerie du CG pour imprimer ses tracts, ou faire payer les petits fours du meeting de campagne sur le budget réception du dit CG.

Non le législateur a prévu ce cas mais il faut que le candidat s'acquitte du paiement de cessions de droits pour les images qu'il souhaite utiliser dans sa campagne. Si le canton du conseiller général en question (qu'il soit président ou pas, ne change rien à l'affaire) compte moins de 9000 habitants, il n'y a pas de plafond de comptes de campagne.

laurent.f

tout dépend du type de contrat entre photographe et département mais de toutes façons, le photographe conserve une certaine "prérogative" sur l'usage de ses images. Il en reste le "créateur" et la notion de libre de droit est là aussi caduque. Cela reste du droit d'auteur.

marthouret

On retombe sur la question du type de contrat qui lie le photographe à son employeur.

Si il y a cession complète des droits, les photos appartiennent au CG... Ce qui ne donne pas forcément le droit à n'importe quel conseiller général de les utiliser à n'importe quelles conditions dans le cadre de ses campagnes.

Mais tout cela est très flou, comme souvent dans ces domaines des collectivités, des élus et des élections...

Je pense que c'est aux juristes inscrits sur la liste de parler !

Bien amicalement

laurent.f

Citation de: marthouret le Juin 14, 2011, 16:17:59
On retombe sur la question du type de contrat qui lie le photographe à son employeur.

Si il y a cession complète des droits, les photos appartiennent au CG... Ce qui ne donne pas forcément le droit à n'importe quel conseiller général de les utiliser à n'importe quelles conditions dans le cadre de ses campagnes.

Mais tout cela est très flou, comme souvent dans ces domaines des collectivités, des élus et des élections...

Je pense que c'est aux juristes inscrits sur la liste de parler !

Bien amicalement

Sans être juriste, je connais tout particulièrement bien ces questions électorales et notamment liées aux cantonales, on rencontre comme dans toute entreprise, trois types de contrats :
- l'auteur-photographe qui fait une cession de droits (souvent le temps de la mandature de la collectivité concernée)
- le photographe employé en CDD pour des missions
- le photographe intégré et employé par la collectivité

zennou

JUste une question : la Justice a tranché, le Tribunal a prononcé un jugement ...

...vous estimez-vous plus compétents que le Tribunal qui, je suppose, avait un dossier complet à sa disposition alors que vous n'avez que 4 lignes.
Comme ça, le jugement peut paraître sévère, le montant étant effectivement élevé. Mais c'est un Jugement.

On verra bien si ça va ensuite en appel.

image04

Citation de: Philippe-C le Juin 14, 2011, 12:56:05
10 000€ , frais d'avocat déduit il lui reste dans le meilleur des cas 1000€ et si  il a de la chance.....!!! Avant d'engager une procédure ; il faut être sûr de son coup , car bien souvent la partie adverse joue sur le fait qu'elle a les moyens d'engager une action en justice ou d'y répondre. De plus tout dépend de la façon dont le photographe attaque, ici il aurait mieux valu attaquer pour escroquerie plutôt que non respect des droits.

Non l'article 700 prevoit a part les frais de procedure forfaitairement et cela ne coute pas si cher que cela, meme si il n'a pas gagné grand chose cela fait avancer l'idée qu'il y a des auteurs derrieres les machines a shooter... et que l'on exploite pas sans accord des oeuvres de l'esprit,
quand bien même on les aurait prétées....
Au risque de contredire stougard une fois de plus on peut tres bien faire des photos gratuitement et demander des droits equitables des lors que les photos sont utilisées... et le droit a la signature est obligatoire j'ai gagné plusieurs proces par defaut de signature

RioBravo

Un procès, surtout s'il risque d'aller en cassation, coûte cher, article 700 ou pas. Si j'en juge par ce que me coûte mon divorce, depuis quatre ans (arrêt d'appel le 30 juin), avec 10 000 € il en est de sa poche. Et encore, mon avocat est un ami qui ne me compte que le minimum.

Mais l'intérêt est de faire un exemple et de créer une jurisprudence utile à tous. L'excellente Me Joëlle Verbrugge nous en dira plus, dès qu'elle aura épluché le dossier.
Jean

laurent.f

Citation de: zennou le Juin 14, 2011, 16:39:26
JUste une question : la Justice a tranché, le Tribunal a prononcé un jugement ...

...vous estimez-vous plus compétents que le Tribunal qui, je suppose, avait un dossier complet à sa disposition alors que vous n'avez que 4 lignes.

Comme ça, le jugement peut paraître sévère, le montant étant effectivement élevé. Mais c'est un Jugement.

Le jugement n'est pas sévère, bien au contraire. Il renforce le droit des photographes avec une jurisprudence supplémentaire et le montant n'est pas élevé. ;)

image04

Le president dit qu'il peut se pourvoir en cassation... mais c'est toujours pour un vice de forme...
en aucun cas pour demander un reajustement des indemnités...

Pour un divorce c'est beaucoup plus compliqué puisqu'il y a un partage des biens, allocations, garde des enfants, reconnaissance des torts... et toutes les complication administratives pour obtenir certificats, temoignages...etc


cfa

Citation de: laurent.f le Juin 14, 2011, 19:58:01

Le jugement n'est pas sévère, bien au contraire.

Ah bon ... et que nous vaut cette affirmation péremptoire ?

10.000 euros pour 33 photos dan un canard de campagne, ce n'est pas sévère...    tu peux argumenter ?

Citation de: laurent.f le Juin 14, 2011, 19:58:01

Il renforce le droit des photographes avec une jurisprudence supplémentaire et le montant n'est pas élevé. ;)


Oui, c'est vrai, bien que la jurisprudence soit assez constante dans ce domaine.


BertrandG

Citation10.000 euros pour 33 photos dan un canard de campagne, ce n'est pas sévère...    tu peux argumenter ?

10.000 euros pour une contrefaçon (= délit) c'est pas cher payé...

RioBravo

"Pour un divorce c'est beaucoup plus compliqué puisqu'il y a un partage des biens, allocations, garde des enfants, reconnaissance des torts... et toutes les complication administratives pour obtenir certificats, temoignages...etc"

Tu as tout à fait raison, Image04. Mon divorce n'est pas un cas d'école.  :D

Mais prends un autre exemple : une simple infraction au Code de la route, qui peut te coûter ton permis. Si ton emploi en dépend, mieux vaut prendre un avocat spécialisé. Les honoraires vont de 2 500 à 4 000 €, pour une seule instance, finalement assez simple. Et, compte tenu du résultat attendu, c'est justifié. Les dépens, dans un tribunal de grand instance, peuvent tourner autour d'un millier d'euros, souvent partagés. En appel, il faut y ajouter les honoraires de l'avoué, pour à peu près autant. L'article 700 permet généralement de récupérer... l'équivalent de la TVA.

Donc, 10 000 € de dommages et intérêts, pour une affaire exemplaire, appelée à faire jurisprudence et dans laquelle toutes les voies de recours ne sont pas épuisées, c'est une somme modérée. Ce président de conseil général un peu désinvolte avec le bien d'autrui (sans parler des entorses aux principes de transparence électorale citées plus haut), je trouve qu'il ne s'en tire pas trop mal. Poursuivre en cassation une procédure qui dépasse maintenant les frontières de son département, c'est prendre le risque d'attirer l'attention du parquet et de la commission électorale.
Jean